Quand l'étranger devient soi
Faut-il donc abandonner définitivement cette opposition dichotomique entre soi et non soi immunologique? «Cette théorie a historiquement rendu de grands services à l'immunologie, mais elle souffre à présent de trop d'exceptions pour ne pas devoir être revue», explique Edgardo D. Carosella.
Pourquoi portons-nous en nous des cellules étrangères?
envoyé par Mediapart. - Regardez les dernières vidéos d'actu. Edgardo D. Carosella, immunologiste de l'hôpital Saint Louis. Echange de cellules mère-enfant
Pas plus que l'identité génétique, l'identité immunologique n'est immuable, contrairement à ce que laisse entendre l'idée de soi. «Comme le génome change au cours des mutations qui interviennent pendant le renouvellement cellulaire, les protéines exprimées à la surface cellulaire peuvent être modifiées au cours du temps. De plus, une cellule modifie en permanence son aspect extérieur et ses fonctions, ce qui s'accompagne de changements d'expression des protéines. Tout cela conduit à des changements de l'identité immunologique, aléatoires dans le premier cas et maîtrisés dans le second», explique Edgardo D. Carosella.
En d'autres termes, le soi immunologique possède une définition absolue dans l'instant, mais relative dans la durée. Cette perpétuelle transformation est même une des conditions de l'efficacité du système immunitaire. Des souris élevées en milieu stérile, dont le système immunitaire est donc peu stimulé par le contact avec des agents extérieurs, se révèlent ainsi très vulnérables aux pathogènes. Surtout, l'identité immunologique est impossible à délimiter de manière définitive. Ce qui était hier du soi peut devenir non soi, et ce qui est aujourd'hui étranger devient demain inclus dans ce soi..., qui ressemble définitivement autant à une métaphore qu'à une théorie.
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