Le roman de Leonid Guirchovitch publié par les éditions Verdier, Schubert à Kiev, est un féroce mouvement musical, une représentation et déconstruction romanesque. Andante, moderato, vivace, ou presto, ritardando certainement. En contrepoint, un assourdissant silence. Celui des morts, de l’Histoire et des histoires qu’on se raconte. Rencontre avec l’auteur, et sa traductrice-complice, Luba Jurgenson. Guirchovitch est l'invité du Salon du livre en mars prochain.
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« Leonid n’est pas politiquement correct », dit Luba Jurgenson en descendant l’escalier. Après lecture de Schubert à Kiev, qu’elle a non seulement traduit mais publié dans la collection qu’elle co-dirige chez Verdier, on s’en doutait un peu. Et voici donc Leonid, œil qui frise et coincé sur la banquette par la sciatique. Guirchovitch, juif russe qui a quitté l’Urss avec ses parents au début des années 1970 – période refuznik –, vécu en Israël avant de s’installer en Allemagne voilà trente ans, pose sur le monde un regard à la fois exogène et savant. Comme le narrateur inconnu de Schubert : « Tout est vu en contre-plongée, en russe on dit la perspective de la grenouille. C’est le regard de celui qui est caché, le petit homme immergé dans la masse temporelle au jour le jour, sans horizon aucun », dit-il.