Culture et idées Analyse

«Le Lièvre de Patagonie» de Claude Lanzmann: mémoires de l'increvable vogueur

Dans ses mémoires à paraître le 12 mars, Le Lièvre de Patagonie (Gallimard, 546 p., 25€), Claude Lanzmann empoigne son lecteur pour ne plus le lâcher dans les méandres, les brusqueries, la puissance et la douceur d'un récit qui se joue de la chronologie. Aux antipodes d'un inventaire avant décès, cet hymne à la vie, prodigieux, rocambolesque et réfléchi, nous gonfle de torpeurs enivrantes.

Antoine Perraud

Illustration 1

L’effraction sensible est son mode d’expression. À près de 84 ans, Claude Lanzmann déboule toujours avec force, mais non sans fêlures endeuillées. Il y a chez lui du King Kong au faîte fatal de l’Empire State Building; ou du Porthos retenant la grotte de Belle-Île avant l’effondrement.
Le premier mot saisit le lecteur au collet: «La guillotine». Claude Lanzmann évoque d’emblée, avec une fièvre et un sentiment d’urgence qui l’ont assailli dès la petite enfance, la peine capitale et les différents modes d’administration de la mort. Il entreprend un vaste panoramique macabre et zoome soudain sur soi: «Je n’ai pas de cou. Je me suis souvent demandé, dans une nocturne cénesthésie anticipatrice du pire, où le couperet, pour m’étêter proprement, devrait s’abattre.»

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