La conclusion est aussi limpide que le rapport est touffu : le château de cartes de produits financiers complexes qui s'écroule depuis l'été dernier correspondait à un énorme transfert de risques des Etats-Unis vers le reste du monde.
L'analyse sur le «transfert du risque de crédit» (CRT, ou credit risk transfer) publiée mardi 1er avril à Bâle sous l'égide de la Banque des règlements internationaux (BRI), ne consolera pas les dirigeants de la banque suisse UBS qui ont annoncé le même jour, non loin de là, de nouvelles et considérables pertes (19 milliards de dollars) liées à la crise dite des «subprimes». Mais cela les aidera à comprendre, si nécessaire, comment le ciel leur est tombé sur la tête.
«Géographiquement, le risque transféré dans le CRT est réparti à travers le monde», note le groupe d'experts de banques centrales réunis dans le cadre du Comité de Bâle de supervision bancaire. Mais, ajoutent-ils, «la plus grande partie des risques transférés ces dernières années avait son origine sur le marché des titres adossés à des actifs (ABS ou asset backed securities), le marché des crédits à effet de levier et le marché de la dette d'entreprise.» Or, «tous ces marchés sont dominés par des actifs situés aux Etats-Unis, même si les actifs européens représentent une minorité significative». Dès lors, «ceci suggère que le transfert du risque de crédit contribue à diversifier le flux du risque du crédit à partir des Etats-Unis dans les mains d'une base globale d'investisseurs». Et voilà pourquoi votre fille est muette !
Une ironie supplémentaire tient à ce que ce rapport prend le relais d'une mise en garde publiée en 2005 par le même groupe, à la demande du Forum de stabilité financière, mais dont les recommandations ont été largement ignorées alors même que l'activité de transfert du risque de crédit connaissait une croissance exponentielle.
Premier document de synthèse officiel sur la crise des «subprimes», le rapport a le mérite de rassembler et de confirmer point par point l'accumulation invraisemblable d'erreurs, d'aveuglements, ou tout simplement de fraudes, qui a conduit à la plus grave crise financière depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
D'abord, « les normes de souscription des crédits à risque émis aux Etats-Unis ces dernières années étaient extrêmement laxistes» et de ce fait «quand les prix des logements ont faibli fin 2006 et en 2007, le taux de défaillance sur les crédits à risque à taux variable a explosé».
Deuxièmement, les produits financiers structurés mis en place pour transférer le risque de crédit de l'émetteur à l'investisseur (principalement, les «ABS CDO» ou ABS collateralised debt obligations) «étaient construits d'une manière qui les rendaient particulièrement vulnérables au risque d'un déclin des prix de l'immobilier aux Etats-Unis».
Économie et social
Crise financière : une arnaque «made in USA»
Dessin de Damien MacDonald La pyramide de produits financiers qui s'écroule depuis l'été dernier correspondait à un transfert des risques de crédit des Etats-Unis vers le reste du monde, révèle un rapport. Regarder aussi le manga: une bande dessinée sur cette crise financière.
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