Les sceptiques n'ont qu'à aller voir ailleurs. « Nous ne sommes pas sortis de la crise économique, mais nous sommes en train de tourner la page de la crise financière », avait expliqué, en fin de Conseil européen la semaine dernière, Nicolas Sarkozy, dans la peau du soldat qui a gagné la bataille. L'euro sauvé, la pression des marchés évaporée, il ne resterait « plus qu'à » sortir l'Europe de la récession.
Aussi hasardeuse soit-elle, cette lecture de la crise a le mérite de déplacer l'attention, et de faire surgir d'autres débats. On parle encore beaucoup d'austérité et de discipline budgétaire à Bruxelles (voir ces jours-ci la crise qui couve entre Madrid et le reste de l'Union), mais la fragile accalmie des derniers jours permet d'engager d'autres discussions, par exemple sur la relance de l'économie du continent. Une aubaine pour le candidat de l'UMP, qui se sait condamné à la défaite s'il ne parle que de rigueur.
Le président français s'est donc engouffré dans la brèche, pour proposer un nouveau remède à l'Union asphyxiée : la « réciprocité » en matière de commerce. « J'ai demandé la règle de la réciprocité dans les négociations commerciales », a-t-il déclaré vendredi. « Si certains pays d'Asie ne veulent pas ouvrir leurs marchés publics aux entreprises européennes, il faut clairement poser la question de l'ouverture des marchés européens aux entreprises de ces pays-là. C'est pas du protectionnisme, c'est de la réciprocité. »
Allusion à une offensive menée depuis l'an dernier par deux commissaires européens, le français Michel Barnier et le belge Karel de Gucht, pour faciliter l'accès des entreprises européennes aux marchés d'Asie - et d'abord chinois, jusqu'à présent surtout réservés... aux Chinois. De manière plus générale, bon nombre de pays émergents d'Asie, Inde en tête, ont multiplié les mesures protectionnistes depuis le début de la crise. De la Russie aux États-Unis, les droits de douane sont en hausse un peu partout dans le monde. Les journaux financiers observent à regret une tendance à la « dé-globalisation ».
PS, UMP: le protectionnisme fait un retour discret dans la campagne
Après le succès ambiguë de la « démondialisation » d'Arnaud Montebourg, l'UMP cherche à monter en puissance sur le thème de la « réciprocité » commerciale. Un concept qui ressemble à s'y méprendre au « juste échange » des socialistes... Au-delà des postures de candidats en campagne, c'est un débat de fond qui s'enclenche.
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