«En fin de compte, les budgets publics qui sont gravement déséquilibrés doivent inévitablement être réformés, soit par la force des marchés, ou de préférence, par choix politique. Malheureusement, les nations doivent souvent subir une crise profonde pour que l'attention du gouvernement se concentre sur les mesures de correction. En général, c'est quand ce point est atteint que les gouvernements restaurent la discipline budgétaire et renouvellent leur attachement à une banque centrale indépendante. Ironiquement, toutefois, ces réformes sont précisément celles qui auraient prévenu la crise. La seule différence entre les pays qui traversent une crise budgétaire et ceux qui y échappent est la prévoyance conduisant à agir avant que les circonstances et les marchés ne l'imposent.»
A quel pays cette (trop) longue mais précieuse citation fait-elle référence? La Grèce? Demain, le Portugal ou l'Espagne? Et après-demain, la France? En fait, les Etats-Unis. «A terme, des réformes budgétaires significatives et permanentes doivent être mises en œuvre aux Etats-Unis», concluait Thomas Hoening, le président de la Réserve fédérale de Kansas City le 16 février. Son intervention, devant une commission d'étude de la réforme budgétaire à Washington, et l'étude publiée le 17 février par la Banque des règlements internationaux, la banque des banques centrales, viennent opportunément souligner quelques évidences.
Un, la crise grecque n'est qu'un amuse-gueule compte tenu de la situation intenable des finances publiques dans la grande majorité des pays développés. Deux, l'endettement «au bilan», celui qui est affiché officiellement en forte hausse du fait de la crise financière mondiale, n'est que la partie émergée d'un iceberg, les engagements «hors bilan» non financés liés au vieillissement des populations. Trois, le retour à un déficit inférieur à 3% du PIB (qui d'ailleurs n'a jamais été un objectif mais un plafond!) du défunt Pacte de stabilité et de croissance de l'Union europénne est une mauvaise plaisanterie: ce dont il va s'agir, c'est de dégager des excédents budgétaires primaires (avant service de la dette) substantiels pour éviter la banqueroute. Quatre, la question n'est pas de savoir s'il faudra payer trente années de dérives budgétaires, mais qui paiera et de quelle manière.
D'abord, l'état de lieux. «Selon l'OCDE, rappellent Stephen Cecchetti, patron de la recherche de la BRI, et ses collègues dans leur étude, la dette totale du secteur public des pays industrialisés devrait dépasser 100% du PIB en 2010, ce qui n'est jamais advenu en temps de paix.» Mais «pour aussi mauvais que ces problèmes budgétaires puissent apparaître, s'en tenir uniquement à ces chiffres officiels est certainement la garantie de se tromper lourdement.» Certes, admettent-ils, certains pays, notoirement le Japon, ont enfoncé ce plafond depuis longtemps sans pour autant avoir été châtiés par les marchés (argument que nous avons déjà examiné ici).
Économie et social Analyse
Dettes publiques : la crise grecque n'est qu’un amuse-gueule
Dans la crise des dettes publiques des pays avancés, l'épisode grec n'était qu'un amuse-gueule, pas même le hors-d'œuvre. La crise financière n'a fait que charger un peu plus une barque déjà sous la ligne de flottaison et que les dépenses liées au vieillissement de la population promettent au naufrage. Le président de la Fed de Kansas City et les économistes de la BRI viennent de rappeler quelques évidences. Analyse.
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