Olivier Ferrand, président de la fondation Terra Nova, think tank proche du Parti socialiste, devait publier son rapport sur les retraites mi-avril. Il ne sera rendu public que ce vendredi. «Il s'agissait de ne pas court-circuiter la communication du PS», explique ce proche de Dominique Strauss-Kahn. En fait, la note a bien embarrassé le PS. Pour financer les retraites, Terra Nova propose en effet de taxer... les retraités. Prudente, Martine Aubry, la première secrétaire du PS, n'a pas intégré sa proposition dans la liste des 37 milliards de prélèvements supplémentaires qu'elle envisage d'ici 2025 pour financer les retraites. Pas question de se mettre les électeurs âgés à dos...
Terra Nova ne fait pourtant que constater. Les retraités bénéficient d'avantages fiscaux: un abattement de 10% pour frais professionnels, alors qu'ils ne sont plus en activité, des majorations de retraite défiscalisées, un taux de CSG (contribution sociale généralisée) réduit à 6,6%, quand celui des actifs est de 7,5%. «Il n'est pas normal que l'ancien PDG de Vinci, parti avec une retraite-chapeau de 2 millions par an, paie une CSG réduite par rapport à celle du smicard, explique Olivier Ferrand. Il faut donc aligner la fiscalité des retraités sur celles des actifs. Un tiers des retraités seraient concernés: ceux qui paient des impôts, donc les plus aisés.» Gain escompté de l'opération pour la seule CSG: 3 milliards par an. Un dixième du déficit des retraites en 2010.
La proposition de Terra Nova, également défendue par la mission d'évaluation et de contrôle de la Sécurité sociale du Sénat, lui a valu quelques réactions outrées: «Une monstrueuse injustice sociale», dixit la Confédération française des retraités; Terra Nova «vise à infléchir à droite les positions du PS», s'emporte l'économiste Henri Sterdyniak... En fait, les propositions de Terra Nova ont surtout suscité un silence assourdissant. Comme s'il s'agissait d'une énormité. L'UMP n'en veut pas. «C'est un tabou pour nous, dit Arnaud Robinet, député chargé du dossier. Cela reviendrait à baisser les pensions. Or les retraités aident leurs enfants et leurs petits-enfants.»
Fin de la polémique? Pas sûr. Car, en moyenne, les retraités actuels se portent plutôt bien par rapport aux actifs. «Nos représentations collectives associent retraites et pauvreté. C'était vrai il y a trente ans. Ça ne l'est plus», dit Olivier Ferrand. Certes, un retraité sur dix est pauvre, et 600.000 bénéficient du minimum-vieillesse (708 euros), inférieur au seuil de pauvreté (908 euros). Pourtant, le taux de pauvreté des plus de 60 ans dépassait encore 30% en 1970. Aujourd'hui, leurs pensions sont inférieures à celles des actifs, mais leur niveau de vie est proche. Selon l'Insee, un retraité disposait en 2007 d'un niveau de vie moyen de 21.540 euros, contre 22.470 pour un actif. Un écart faible, qui peut même être gommé puisque les retraités n'ont pas d'enfants à charge et sont proprétaires de leurs logements à 75% (contre 50% pour les actifs, souligne Terra Nova).
Économie et social Analyse
Taxer les vieux pour payer les retraites?
Champions de l'épargne et du patrimoine, pourquoi les retraités ne seraient pas taxés eux aussi pour financer les retraites? C'est ce que propose la fondation Terra Nova, think tank proche du PS.
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