Voici les quatre questions que nous avions posées au ministre de la défense Jean-Yves Le Drian, et les réponses que nous a apportées son responsable de la communication :
1. J’ai bien noté que dans votre réponse au premier président de la Cour des comptes, vous pointiez le fait que le ministère de la défense n’est pas intervenu « directement » dans la définition de la valeur des biens concernés. Mais que veut dire « directement » ? Et quel est votre jugement sur ces valeurs ? Considérez-vous que le patrimoine public a été bradé ? Si oui, comment l’expliquez-vous ? Et quelles suites entendez-vous donner à cette affaire pour défendre les intérêts patrimoniaux de l’État et notamment ceux dont vous avez la charge ?
Dans le cadre de la procédure de cession de biens domaniaux, le ministère de la défense, comme tous les autres ministères, n’intervient pas dans la définition de la valeur de cessions des emprises cédées. Cette compétence relève du seul ministère chargé du budget à travers le service France Domaine. Le ministère n’intervient sur un plan technique dans le cadre de la procédure de cessions que pour se prononcer sur l’utilité des immeubles pour les besoins de la défense. C’est ainsi, concernant les cessions mentionnées dans le référé de la Cour des comptes, que le ministère n’est intervenu que pour donner son accord pour la vente de 32 emprises sur les 64 emprises que souhaitait acquérir la SNI.
Le ministère de la défense n’a pas vocation à se prononcer sur le prix de vente des emprises cédées car il ne dispose pas des compétences techniques pour le faire, en cohérence avec ses modalités d’intervention dans les procédures de cession. Dans le cas des cessions évoquées par le référé de la Cour des comptes, la Défense aurait été d'autant moins à même de se prononcer sur le prix de cession qu'il s'agissait notamment de prendre en compte, dans l'évaluation, le bail emphytéotique dont bénéficiait la SNI, ce qui nécessitait une analyse financière et interdit une appréciation qui reposerait sur une simple comparaison avec les prix du marché.
Il convient néanmoins de souligner que dans chaque acte notarié lié aux différentes ventes, France Domaine a prévu une clause d'intéressement, sur une durée de 5 ans, pendant laquelle l’État aura droit, sous des conditions que les actes précisent, à un taux de retour du montant d'une nouvelle vente si celle-ci est supérieure à la cession initiale.
En tout état de cause, dans le cadre de la loi de programmation militaire (LPM) 2014-2019, les ressources budgétaires destinées au financement de l’infrastructure de la défense sont complétées du produit des cessions des immeubles devenus inutiles au ministère. L’intégralité des produits des cessions immobilières réalisées sur la période 2014-2019 lui sera ainsi affectée. Dans ce cadre, le ministère porte évidemment la plus grande attention aux cessions en cours et à venir, en lien avec les services du ministère chargé du budget.
2. Très proche de Nicolas Sarkozy, le président de la SNI André Yché s’est distingué sous le précédent quinquennat en voulant conduire une véritable privatisation des sociétés HLM dont il avait la charge, et il a profité durant ces cinq années de fortes protections élyséennes. L’alternance passée, rien ne semble avoir changé : André Yché poursuit la même politique à la tête de la SNI et semble disposer de protections similaires. Ai-je selon vous raison de faire ce constat ?
En sa qualité de ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian n’a aucun commentaire à émettre sur la politique de logement.
3. Puis-je vous demander pour quelle raison vous avez remis à André Yché le 10 juillet dernier les insignes de commandeur de l’Ordre national du mérite ? Qu’est-ce qui justifie cette distinction, qui a été délivrée au nom du ministère de la défense ?
André Yché a réalisé une grande partie de sa carrière opérationnelle au sein de l’armée de l’air. À vingt-deux ans, il intègre l’école de l’air. Il est breveté pilote de transport en 1978, commandant de bord en 1981 et rejoint les forces aériennes stratégiques la même année. On lui doit vingt-deux campagnes outre-mer et à l’étranger de 1978 à 1992, en Afrique, en Asie, en Océanie et en Amérique.
Sa biographie vous apprendra également qu’André Yché est devenu en 1997 directeur adjoint du cabinet civil et militaire du ministre de la défense, Alain Richard. Il occupera ce poste jusqu’en juillet 1999 et sera promu au grade de contrôleur général des armées en juin 2000.
Pour l’ensemble de ces raisons, de ses responsabilités et de ses qualités, André Yché a été élevé au rang de commandeur de l’Ordre national du mérite.
4. Le 29 janvier 2013, le président de la SNI André Yché a organisé une réception pour présenter ses vœux aux partenaires de sa société pour l’année nouvelle. Pourquoi avez-vous autorisé que cette réception ait lieu aux Invalides ? Ne trouvez-vous pas choquant qu’une filiale de la Caisse des dépôts, intervenant de surcroît dans le secteur du logement social, organise une réception d’un luxe que même un groupe du CAC 40 n’ose pas afficher ? En ces temps de crise, n’est-ce pas choquant qu’une entreprise publique use de la sorte de l’argent public ?
La SNI s’est constituée avec le patrimoine immobilier de la défense et a conservé des liens historiques avec le ministère. Depuis plus de dix ans déjà, la SNI organise aux Invalides sa cérémonie de vœux. Dans ce cadre, elle loue une salle et les services du traiteur de son choix.