Trois longs métrages de factures très différentes, mais trois films violents chacun à leur manière, parce qu’inscrits dans des mondes où la mort et la déglingue sont partout présentes au programme du 101e numéro de « L’esprit critique ». On évoque le dernier opus de la saga « Mad Max » intitulé Furiosa et signé George Miller, la nouvelle plongée du cinéaste Karim Dridi dans un univers en marge de la société avec son film intitulé Fainéant·es, et enfin le premier long métrage du réalisateur colombien Theo Montoya intitulé Anhell69.
« Furiosa. Une saga Mad Max »
Furiosa est le blockbuster du moment, projeté hors compétition en ouverture du Festival de Cannes de cette année. Toujours réalisé par l’Australien George Miller, il peut être considéré comme une sorte de préquel du précédent opus de la saga Mad Max, Fury Road, sorti en 2015, puisqu’il retrace l’enfance et la jeunesse de Furiosa, faite captive par le très bien nommé Dementus, régnant sur sa horde de motards barbares et cherchant à s’approprier les rares ressources en eau et en essence de ce monde postapocalyptique.
Furiosa. Une saga Mad Max, de George Miller, est en salles depuis le 15 mai dernier.
« Fainéant·es »
Révélé avec Pigalle au début des années 1990, un film qui nous plongeait dans un milieu de drogués, mafieux, alcooliques, stripteaseuses et voleurs, en mêlant acteurs professionnels et véritables habitants de ce quartier de Paris, le réalisateur Karim Dridi continue de s’intéresser aux marges et aux invisibles de la société comme il l’avait fait avec le camp gitan de son film Khamsa ou avec les jeunes trafiquants filmés dans Chouf.
Dans Fainéant·es, Karim Dridi suit le parcours de Nina et Djoul, immergées dans le monde nomade des squats, des punks, des travailleurs saisonniers et des teufeurs. Les deux femmes se tiennent les mains, partent sur les routes, se séparent, se retrouvent et se confrontent à la violence intime ou sociale qui les traverse.
Fainéant·es, de Karim Dridi, est en salles depuis le 29 mai.
« Anhell69 »
Anhell69 est le premier long métrage du Colombien Theo Montoya. Son titre est issu du pseudonyme Instagram de l’un des personnages principaux, contraction d’Angel et de Hell, pour cette plongée en enfer de visages angéliques cernés ou engloutis par la mort.
Le film s’ouvre sur un corbillard dans lequel a pris place le réalisateur, dont la voix off nous accompagne tout au long du film, une plongée dans le monde trans de Medellín qualifiée de « cimetière », sans autre horizon que la violence et la mort.
Le réalisateur, qui est aussi directeur de la photographie et producteur du film, est né en 1995, « deux ans après la mort de Pablo Escobar » : sa vie se résume à un père disparu, une adolescence dans la rue à fumer de la marijuana, et la découverte du cinéma dans les salles obscures, « le seul endroit » où il pouvait pleurer.
À l’origine, Anhell69 devait être une série B fantastique centrée sur une secte de « spectrophiles » de Medellín – une bande de jeunes qui couchent avec des fantômes –, persécutée par des milices conservatrices. Mais ce projet lancé en 2017 par Theo Montoya ne verra pas le jour, notamment parce qu’après les premiers essais de casting qui constitue l’une des matières du film, l’acteur principal et ami du cinéaste est mort à 21 ans d’une overdose.
Anhell69, de Théo Montoya, est sorti en salles mercredi 29 mai.
On discute de ces trois films avec :
- Occitane Lacurie, membre du comité de rédaction de la revue de cinéma Débordements, doctorante en esthétique et études visuelles ;
- Alice Leroy, qui écrit pour les Cahiers du cinéma et Panthère Première ;
- Et Salima Tenfiche, EHESS-Mucem.
« L’esprit critique » est un podcast enregistré dans les studios de Gong et réalisé par Karen Beun.