En Europe, les marchés veulent y croire: c'est l'em-bel-lie. Après les remous sévères du printemps, la situation se «normalise» au cœur de l'été. Les tests de résistance des banques, à la méthodologie pourtant contestée, sont censés avoir démontré fin juillet la solidité du système financier européen. Les résultats trimestriels de poids lourds comme BNP Paribas dopent les Bourses cette semaine.
Le Portugal, l'Espagne et l'Irlande ont réussi, ces derniers jours, des placements de dettes souveraines, preuve que les marchés sont moins sceptiques qu'auparavant sur la capacité de ces pays jugés à risque, à rembourser leur dette. Enfin, comme si cela ne suffisait pas, le comité de Bâle a annoncé des assouplissements dans son projet de régulation financière, façon discrète de brosser les acteurs du marché dans le sens du poil, et de les laisser partir en vacances le cœur léger.
Tous les signaux ne sont pourtant pas au vert, en particulier l'accès au crédit, pour les ménages comme pour les entreprises, toujours restreint. Et une inquiétude enfle: la crise profiterait de l'été pour muter une nouvelle fois. L'attention s'était d'abord concentrée, en 2007, sur la dette privée des ménages américains, avant de se déplacer, courant 2009, sur les dettes publiques des Etats. Et si le tour des banques centrales était venu?
Depuis l'éclatement de la crise des subprime, ces institutions ont renoué avec une conception volontariste de leur métier qu'on ne soupçonnait plus. Elles ont prêté aux banques près de 2.000 milliards de dollars à taux zéro. Elles ont réduit sans lésiner leurs taux d'intérêt pour soutenir l'activité de la planète. Bref, elles se sont dépensées sans compter. Mais n'ont-elles pas pris trop de risques? Ne sont-elles pas allées trop loin, en osant racheter des actifs «toxiques» détenus par des Etats, «type Grèce»?
En Europe, la rupture s'est produite le 10 mai. Dans le jargon financier en cours à Francfort, on parle de «mesure non-conventionnelle». Jusqu'à présent, la BCE prêtait surtout aux banques du continent. Cette fois, elle se lance, de façon volontariste, dans le rachat d'emprunts auprès des Etats, ceux-là mêmes que les marchés se refusaient à acheter durant la crise grecque. Dans des proportions importantes: l'institution a déboursé pas moins de 60,5 milliards d'euros depuis mai. Mais le rythme de ces opérations connaît un net ralentissement ces derniers jours: elle n'en a racheté qu'à hauteur de 81 millions la semaine dernière, confirmant la thèse du «retour à la normale».
Les banques centrales sont-elles le prochain maillon faible?
C'est l'été, et les marchés en Europe se «normalisent». Soulagement de la planète économique, après les violents remous du printemps. Mais peut-être la crise n'est-elle qu'en train de muter: les banques centrales font l'objet de nouvelles inquiétudes.
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