Économie et socialAnalyse

Commerce international: en attendant Obama

Contrairement aux apparences, Barack Obama s'intéresse au commerce international. Il vient de décider un décuplement des droits de douane sur les pneumatiques chinois importés aux Etats-Unis. Mais en dépit de l'engagement pris au G20 de Londres, et qui sera sans doute renouvelé à Pittsburgh, l'administration américaine traîne les pieds dans la relance des négociations du cycle de Doha. Comme rupture avec l'unilatéralisme, on peut rêver mieux. Analyse.

Philippe Riès

La décision du gouvernement américain de multiplier pratiquement par dix les tarifs douaniers imposés aux pneumatiques de fabrication chinoise importés aux Etats-Unis est sans doute le premier signe de l'intérêt que porte l'administration Obama au dossier du commerce international. On aurait évidemment pu souhaiter une entrée en matière plus positive, mais c'est encore préférable à la négligence manifestée par le nouveau président et son équipe depuis leur entrée en fonction en janvier dernier. Et, paradoxalement, ce n'est pas nécessairement de mauvais augure pour la conclusion en 2010 (ou alors sans doute jamais) d'un accord sur les «modalités» du cycle de Doha des négociations commerciales multilatérales à l'OMC.
Après les protestations indignées d'usage et les menaces de contre-offensive (sur les poulets et les pièces détachées automobiles), la Chine a emprunté le chemin bien balisé du mécanisme de règlements des conflits de l'OMC. Elle a demandé des consultations avec les Etats-Unis, et c'est seulement en cas d'échec qu'une plainte en bonne et due forme sera déposée.
«Nous ne croyons pas que ce dossier marque le début d'une guerre commerciale du type Grande Dépression et nous ne croyons pas qu'Obama soit protectionniste», estime Arthur Kroeber, qui édite la lettre d'analyse économique et financière sur la Chine Dragonweek. «Les syndicats américains accusent les importations de pneumatiques chinois, qui sont passées de 15 à 46 millions de pièces entre 2004 et 2007, d'avoir provoqué la destruction de 7.000 emplois aux Etats-Unis. Obama doit se prévaloir d'une certaine crédibilité dans la perspective de futurs accords commerciaux en manifestant sa détermination à imposer des sanctions autorisées par les accords antérieurs», explique-t-il.
Le gouvernement américain a en effet invoqué très précisément les clauses de sauvegarde négociées lors du processus d'adhésion de la Chine à l'OMC (effective à Doha en 2001, au moment même du lancement du cycle), qui prévoient des actions correctives en cas de perturbation d'un marché par une poussée brutale des importations. Les tarifs sont imposés pour trois ans, et de manière dégressive (de 35% ad valorem la première année à 25% la troisième). Le gouvernement chinois, qui avait accepté ces conditions certes sous la contrainte des négociateurs américains, ne doit pas oublier qu'il a été lui-même, depuis son entrée à l'OMC, à l'origine de plusieurs procédures visant ses partenaires commerciaux.

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