Deux séismes font près de 4 900 morts en Turquie et en Syrie

Deux puissants tremblements de terre suivis de dizaines de secousses ont frappé le sud-est de la Turquie et le nord-ouest de la Syrie. Le froid ralentit la recherche de survivants et plus de 19 000 blessés sont déjà recensés.

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Près de 4 900 personnes ont trouvé la mort, lundi 6 février, dans deux puissants tremblements de terre, suivis de dizaines de secousses, qui ont frappé le sud-est de la Turquie et le nord-ouest de la Syrie. Ce bilan provisoire pourrait s’alourdir au fur et à mesure de la progression des secours dans les nombreux immeubles qui se sont effondrés des deux côtés de la frontière, dans une zone déjà ravagée par la guerre et où vivent de nombreux réfugiés.

La première secousse, d’une magnitude de 7,8, ressentie à Chypre, en Égypte, en Israël et au Liban, a eu lieu en pleine nuit, à 4 h 17, dans la province turque de Kahramanmaras (sud-est), à 60 kilomètres environ à vol d’oiseau de la frontière syrienne, et à une profondeur d’environ 17,9 kilomètres. La seconde, d’une magnitude de 7,5, s’est produite moins de dix heures après dans la même région.  

Au moins 3 381 personnes ont trouvé la mort dans dix provinces turques et au moins 16 000 ont été blessées, selon un décompte des autorités turques mardi matin. La ville de Gaziantep, proche de l’épicentre, est particulièrement touchée. Son château, bâti sous l’empire hittite au IImillénaire avant notre ère et devenu une attraction touristique, a été partiellement détruit. C’est aussi dans cette ville que se trouve l’un des principaux camps de réfugié·es syrien·nes géré par les Nations unies.

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Des sauveteurs portent un corps retrouvé dans les décombres à Adana en Turquie, le 6 février 2023. © Photo Can Erok / AFP

Le dernier grand séisme en Turquie remonte au 17 août 1999 à Izmir, dans le nord-ouest, quand 17 000 personnes avaient été tuées, dont un millier à Istanbul.

La Turquie est une zone tectonique très active, explique sur le site de la RTBF Michel Van Camp, chef du service de sismologie-gravimétrie à l’Observatoire royal de Belgique. La faille nord-anatolienne « court le long de la Turquie, depuis l’Irak jusqu’à Istanbul ». « Ce sont des zones où les morceaux de croûte terrestre bougent les uns par rapport aux autres, malheureusement pas sans chocs et sans heurts, en créant de temps en temps des tremblements de terre de magnitude importante, et c’est ce qui s’est passé cette nuit », a précisé le sismologue.

Les secousses du premier séisme ont été ressenties jusqu’au Groenland, a annoncé lundi l’institut géologique danois. « Les ondes du séisme ont atteint le sismographe de l’île danoise de Bornholm [en mer Baltique – ndlr] environ cinq minutes après le début de la secousse », a expliqué la sismologue Tine Larsen. « Huit minutes après le tremblement de terre, la secousse a atteint la côte est du Groenland, se propageant ensuite à travers tout le Groenland. »

En Syrie, le bilan provisoire des victimes s’élevait mardi matin à 1 509 morts et plus de 3 500 blessées, selon le gouvernement et les secouristes. L’agence Sana a diffusé des images montrant d’importantes destructions dans plusieurs villes, dont Lattaquié, sur la côte méditerranéenne, où des bâtiments entiers se sont effondrés.

À Alep (nord), deuxième ville de Syrie, qui a subi de lourdes destructions au cours d’une décennie de guerre, au moins 46 bâtiments se sont effondrés, faisant 156 décès, selon les autorités locales citées par Sana.

À Hama (centre), un immeuble de huit étages où se trouvaient environ 125 résident·es s’est effondré, a déclaré à l’AFP une source du Croissant-Rouge syrien. Les secours s’affairaient à sortir victimes et blessé·es des décombres.

Le ministère syrien de l’éducation a annoncé de son côté la fermeture des écoles dans toutes les régions contrôlées par le pouvoir jusqu’à la fin de la semaine. La raffinerie de Baniyas est hors service, a annoncé le ministère syrien des transports.

Dans les zones rebelles, les secouristes des Casques blancs ont fait état lundi d’au moins 385 morts et plus d’un millier de blessés, ajoutant que ce bilan risquait d’augmenter, « des centaines de familles étant sous les décombres ».

L’organisation, qui opère dans des zones contrôlées par des factions djihadistes et rebelles, a averti que ses équipes étaient confrontées à de « grandes difficultés », réclamant du « matériel lourd de secours ».

Les Casques blancs ont évoqué l’effondrement total de plus de 133 bâtiments et 272 autres de manière partielle, auxquels s’ajoutent des milliers de bâtiments fissurés dans le nord-ouest de la Syrie. D’importants dégâts ont également été constatés dans les zones les plus proches de la frontière avec la Turquie, comme Azaz et Jarablous (au nord d’Alep) et Sarmada (au nord d’Idleb).

Aide internationale

De nombreux pays étrangers ont proposé leur aide peu après les secousses. L’Italie a proposé à la Turquie l’aide de sa protection civile. La Conférence épiscopale italienne (CEI) a décidé d’offrir 500 000 euros et a exprimé le souhait que « la solidarité internationale se mette à l’œuvre rapidement pour garantir une reconstruction rapide », a annoncé le président de la CEI, le cardinal Matteo Zuppi. L’Ordre de Malte a pour sa part annoncé le prochain départ d’une équipe de secours dans les zones frappées par le séisme.

Le premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis, a promis de « mettre à disposition […] toutes ses forces » pour venir en aide à la Turquie voisine. La Grèce, qui entretient des relations orageuses avec son voisin et rival régional, a déjà annoncé l’envoi d’un avion de l’armée de l’air grecque avec une vingtaine de pompiers et de l’aide humanitaire. Mitsotakis a précisé que la Grèce pouvait fournir à la Turquie « divers équipements, des équipements médicaux, des couvertures, des tentes » en fonction de ses besoins.

Même si Israël et la Syrie n’ont pas de relations diplomatiques, le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a « approuvé » lundi l’envoi d’aide à Damas. Israël « a reçu une requête provenant d’une source diplomatique pour de l’aide humanitaire en Syrie et je l’ai approuvée », a déclaré Nétanyahou devant les députés de son parti, le Likoud. L’aide sera envoyée sous peu, a-t-il précisé. Son bureau a refusé de donner plus de détails concernant la « source diplomatique ». La Syrie ne reconnaît pas l’existence d’Israël, et les deux pays se sont plusieurs fois affrontés. Israël a également proposé son aide à Ankara : une équipe de secouristes spécialisés part lundi pour la Turquie et une autre équipe avec de l’aide humanitaire suivra mardi, selon le ministère syrien des affaires étrangères.

Sur Twitter, le président Emmanuel Macron a expliqué que « la France se tient prête à apporter une aide d’urgence aux populations sur place ».

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