Idées

L'affaire Dreyfus est aussi une affaire d’homophobie

Trois historiens révèlent que, pour forcer la décision des juges, Alfred Dreyfus fut aussi présenté comme lié à un réseau d'attachés militaires étrangers homosexuels. Ce volet de l'Affaire est publiée dans la Revue Histoire Moderne et Contemporaine.

Sylvain Bourmeau

D’abord le produit d’un antisémitisme profond, la condamnation du capitaine Dreyfus par le Conseil de Guerre en 1894 fut également rendue possible par l’instrumentalisation d’un sentiment homophobe auprès de ses juges : c’est la révélation majeure de trois historiens dans un article de la dernière livraison de cette très sérieuse revue.
Grâce à leur relecture du fameux mais méconnu « dossier secret », c’est un véritable « scoop historique » que livrent Pierre Gervais, Romain Huret et Pauline Peretz. Aucun de ces historiens, tous américanistes, n’est pourtant spécialiste de la question – et c’est paradoxalement cette distance à l’Affaire, objet historiographico-politique de prédilection, qui leur a permis de renouer avec une pratique historienne qui doit toujours s’alimenter aux sources et, en l’occurrence, à des archives sans doute depuis trop longtemps désertées.
Tout commence à la fin des années 1980 par la lecture que fait Pierre Gervais d’un article publié dans l’un de ses magazines de chevet d’alors… le mensuel de bande dessinée Fluide Glacial ! Le jeune historien y découvre, sous la plume de Bruno Léandri, la tonalité érotique du « dossier secret » et le rôle apparemment non négligeable de la question homosexuelle dans l’Affaire Dreyfus. C’est l’absence totale de référence à cette dimension au moment des commémorations de la Révision qui le conduira, plus de quinze ans après, à convaincre deux de ses collègues à se lancer avec lui dans la recherche qu’ils publient ces jours-ci.

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