Du Ravissement des innocents, premier roman de Taiye Selasi, il est plus simple de dire ce qu’il n’est pas : une image convenue de l'Afrique ou un texte ouvertement politique. Il est aussi insaisissable et multiple que son auteure, née à Londres, élevée aux États-Unis, vivant à Rome, d’origine ghanéenne et nigériane. Rencontre avec Taiye Selasi et premières pages du roman en fin d’article.
CertainsCertains premiers romans laissent immédiatement entendre une voix singulière : Le Ravissement des innocents est de ceux-là. Il est signé par une jeune auteure dont la vie pourrait constituer à elle seule un récit. Née à Londres d’une mère nigériane et d’un père ghanéen, Taiye Selasi grandit aux États-Unis et vit désormais en Europe après avoir parcouru le monde. Elle écrit en anglais, seule langue à pouvoir rassembler ces racines multiples puisqu’elle est parlée en Angleterre comme dans l’Afrique anglophone, aux États-Unis comme en Inde, autant de pays dans lesquels la jeune femme a vécu ou qu'elle a traversés. Et la prose du Ravissement des innocents est, selon les termes mêmes de son auteur, héritière de ces croisements, à l’image d’un roman inclassable, poétique et fragmenté, brossant la saga d’une famille à partir de trois journées suivant un deuil.