Depuis quelques jours, le sujet est revenu dans les conversations des grands patrons: quelles femmes pourraient être pressenties pour siéger dans leur conseil d'administration? La perspective de se voir imposer une loi fixant un quota de 40% de femmes dans les conseils d'administrations des grands groupes dans un délai de quatre ans, comme en Norvège, ne leur plaît guère. A plusieurs reprises, ils ont réussi à enterrer des projets comparables. Cette fois-ci, ils ne le disent pas, ils aimeraient bien faire oublier très vite la proposition de loi présentée par la députée UMP de Moselle, Marie-Jo Zimmermann, ce mercredi après-midi à l'Assemblée nationale.
Mais pour y parvenir, il faut donner des signes de bonne volonté. Les groupes se sentent un peu mal à l'aise pour en apporter des preuves. Depuis dix ans, la question de la représentation des femmes au sein des conseils est régulièrement posée. Mais depuis dix ans, rien n'a changé. Il n'y a que 9% de femmes parmi les administrateurs du Cac 40. Ce qui classe les entreprises françaises au même niveau que la Turquie!
Car on n'entre pas comme cela dans le club le plus fermé de France. Les hommes ne sont guère enclins à partager un pouvoir qui atteint un degré de concentration rarement vu dans une économie moderne : 43% des droits de vote sont dans les mains de 100 administrateurs, selon une étude du cabinet Ernst & Young publiée par Le Monde du 12 janvier. Le poids des banques qui sont archi-dominantes dans les conseils – chaque grande banque ayant dessiné sa zone d'influence –, les échanges d'administrateurs entre groupes amis, les participations croisées, en un mot tout ce qui illustre «ce capitalisme de la barbichette» selon l'expression du financier Albert Frère, ne laissent guère de place à des candidatures extérieures. «Et encore moins pour les femmes. Les changements de direction, les patrons déchus amènent une pléthore de candidats. Il faut d'abord recaser les amis», relève Colette Neuville, présidente de l'association des actionnaires minoritaires.
Les grands patrons récusent l'argument. S'il n'y a pas beaucoup de femmes dans leur conseil, c'est qu'ils manquent de candidates. La liste, à les entendre, est des plus restreintes. Les mêmes noms reviennent à chaque fois: Patricia Barbizet, présidente d'Artemis, Véronique Moralli, dirigeante du groupe Fimalac, Anne Lauvergeon, présidente du directoire d'Areva, parfois certains y ajoutent Laurence Danon, ancienne directrice du Printemps désormais chez Edmond de Rothschild, Virginie Morgon, ancienne associée de Lazard passée chez Eurazeo, Sylvia Jay, qui a l'immense mérite en plus d'être britannique. Et puis, rapidement, l'énumération s'arrête. Et d'un air vaguement contrit, les dirigeants déplorent le peu de femmes susceptibles de siéger à leur conseil.
Une loi pour imposer des femmes dans les conseils des grands groupes
Après la Norvège, la France va-t-elle imposer des quotas de femmes dans les conseils d'administration des grands groupes? Une proposition de loi défendue par la députée UMP Marie-Jo Zimmermann va dans ce sens. Elle propose de réserver 40% des postes d'administrateurs à des femmes. Le monde des affaires s'émeut de ces changements qui pourraient bousculer le club le plus fermé de France.