+19,5 % d’augmentation du prix du maïs, +26 % pour le blé. En moyenne, le prix des denrées alimentaires a augmenté de 6 % entre juin et juillet, selon les chiffres publiés par l’administration fédérale américaine en charge de l’agriculture (USDA), en fin de semaine dernière.
Les principaux responsables sont connus : vague de sécheresse qui frappe l’Europe du sud et surtout les Etats-Unis, production excessive de bioéthanol, augmentation de la demande alimentaire mondiale. Mais au-delà de ces coupables tout trouvés, une zone d'ombre demeure : quel rôle peuvent jouer les spéculateurs dans ces mouvements soudains des marchés ?
La situation est à ce point inquiétante que le ministère de l’agriculture français évoque dans un communiqué, publié lundi 13 août, la possibilité de réunir le Forum de réaction rapide du G20. Créée en 2011, cette structure internationale, encore jamais réunie, est censée lutter contre la trop grande volatilité des prix des matières premières agricoles. Le risque est une nouvelle flambée incontrôlable des prix entraînant des millions de personnes vers l'insécurité alimentaire, voire la famine, comme ce fut le cas en 2008 lors de la dernière grande crise alimentaire et des émeutes de la faim.
Car du point de vue des marchés financiers, les matières premières restent une valeur refuge dans un contexte de récession mondiale. Ainsi, Le Monde, dans son édition du 14 août, affirme que la Deutsche Bank a réalisé ses meilleurs rendements sur les cinq dernières années sur l’or à égalité avec… le maïs.
Les spéculateurs disposent de plus en plus d’outils pour vendre et acheter sur les marchés de matières premières, notamment agricoles. Aujourd’hui, les produits financiers indexés sur les indices de matières premières sont devenus monnaie courante et s’achètent et se vendent à la BNP Paribas, au Crédit agricole ou encore chez Barclay’s. Le blé, le maïs, le café, le soja sont devenus un placement, au même titre que l’or.
Mais de quoi parle-t-on précisement ? « Un marché de matières premières, c’est comme le marché du dimanche matin, explique Benjamin Louvet, responsable à Prim’Finance, société de gestion de matières premières. Sauf que vous allez voir votre maraîcher ou votre fruitier, vous lui achetez des kilos de pêches mais pour dans trois mois. Vous payez une partie tout de suite et le reste à la livraison. Vous paierez un peu plus cher que le prix du marché parce qu’il y a des frais de stockage. Mais si entre temps, le prix augmente, vous conservez le prix d’origine et réalisez une marge. » C’est ce qu’on appelle un contrat à terme.
À l’inverse, un agriculteur, qui sent que les prix vont baisser, va vouloir vendre au plus vite, alors que ses clients industriels préféreront attendre. « C’est là qu’interviennent les marchés financiers, explique Benjamin Louvet, et c’est pour cela qu’on les a autorisés à intervenir car le rapport de force entre agriculteurs et industriels n’était pas équitable. Pour l’agriculteur, ils vont jouer le rôle d’assureur. »
« Un agriculteur cherche un bon prix pour gagner sa vie. Un industriel cherche un bon prix pour faire des marges supplémentaires. Un financier porte le risque à la place du producteur », conclut-il.
Le pain augmente, la faute à la finance ?
Certes, sécheresse et prix du pétrole peuvent expliquer qu'entre juin et juillet, le prix du maïs a augmenté de 19,5 % et celui du blé de 26 %. Mais les acteurs financiers ont aussi leur responsabilité dans ces hausses de prix, qui provoquèrent, en 2008, des émeutes de la faim.
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