Économie et social

L'amour paradoxal des Européens pour l'euro

Une étude de la Banque de France revient sur l'attitude en apparence paradoxale des citoyens européens vis-à-vis de l'euro : ils aiment la monnaie unique tout en la rendant responsable de l'inflation. En Europe, rien n'est simple, tout se complique.

Philippe Riès

En ces temps d'incertitude renouvelée sur l'avenir de la construction européenne, le dernier Bulletin de la Banque de France, publié le 17 juin, offre un éclairage troublant sur l'état d'esprit des citoyens de l'UE vis-à-vis de l'euro, qui fêtera dix années d'existence le 1er janvier 2009.
Du recoupement des cinq sondages Eurobaromètres consacrés à la monnaie unique entre novembre 2006 et mai 2008, il ressort une conclusion paradoxale : les Européens plébiscitent l'euro tout en le rendant responsable de la hausse des prix. Une inflation dont on cherche vainement la trace dans les indices officiels des prix à la consommation.
En moyenne, 61% des Européens se disent favorables à l'euro. Ils sont mêmes 69% dans les pays de la zone euro, avec des sommets (au-dessus de 80%) atteints au Bénélux, en Slovénie et... en Irlande. Les Français sont 74% à considérer positivement la monnaie unique, les Allemands 69%.
Ils attribuent à la monnaie unique des avantages qui pourraient paraître secondaires : faciliter les voyages (pour 46% des sondés) et les comparaisons de prix (30%) ou renforcer la place de l'Europe dans le monde (27%).
Par contre, les citoyens européens ont du mal à percevoir les modifications structurelles majeures favorisées par l'existence de la monnaie unique. Ils ne sont que 5% à citer l'assainissement des finances publiques (pourtant manifeste depuis la mise en œuvre, plus ou moins laborieuse, du Pacte de stabilité et de croissance), et 4 % la baisse des taux d'intérêt. Ce dernier résultat est d'autant plus curieux que le «jeu de la convergence» vers les taux d'intérêt plus bas (ceux de l'Allemagne) après la création de l'euro a permis à des pays comme l'Espagne, le Portugal ou... l'Irlande de profiter d'une chute spectaculaire du coût de l'argent. Baisse qui a contribué fortement au rattrapage économique avant d'alimenter des bulles spéculatives immobilières.

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