France

Les socialistes préparent les législatives dans l'incertitude

Avant la nomination du premier ministre et la composition de son gouvernement, il est encore difficile de savoir quel sera réellement le cap stratégique et programmatique du nouveau parti présidentiel. Qui pour diriger le PS? Avec quelles alliances?

Stéphane Alliès

De l’art délicat de tourner son regard vers les législatives. A peine remis de la victoire de François Hollande, les candidats socialistes aux scrutins des 10 et 17 juin sont encore dans le flou. Au milieu d’une semaine marquée par l’incertitude la plus totale quant à la nomination du futur premier ministre et la composition de son gouvernement, les avis divergent sur la stratégie à employer. Alors que les tensions couvent entre l’entourage proche de François Hollande et la direction du PS, emmenée par les proches de Martine Aubry, Laurent Fabius et Benoît Hamon, il est encore difficile de savoir quel sera réellement le cap stratégique et programmatique du nouveau parti présidentiel.
Le conseil national du PS, qui a été avancé à ce lundi, à la veille de l’investiture de François Hollande à l’Elysée, devrait permettre d’en deviner plus que les contours. Et il promet de jolies galeries de portrait de futurs ministres ou déçus ne le sachant pas encore. Le président Hollande viendra à cette occasion faire ses adieux à un parti dont il avait déjà quitté la direction il y a quatre ans. Une façon aussi de réaffirmer son autorité perdue sur Solférino, tandis que Martine Aubry a déjà annoncé son retrait d’ici le prochain congrès (en novembre prochain). Dans la plus pure tradition mitterrando-jospinienne de 1981 et 1997, c’est en chef de la majorité que Hollande choisira le futur tenancier du parti, à la tête d’une motion unique. Harlem Désir pourrait retrouver son rôle d’intérimaire qui dure, à moins que le président ne missionne son très proche Stéphane Le Foll pour reprendre l’appareil en main.
D’ici là, le doute subsiste encore sur la nature de la campagne législative. Sur quelle ligne ? Avec quel chef ? Quel message ? Quel objectif et quelle coalition ?
Quel chef de campagne ?
Qui pour mener les troupes ? Le premier ministre, comme il est de coutume, ou la première secrétaire du parti, Martine Aubry, qui reste sur des scrutins régionaux et cantonaux victorieux. « Un enfant de cinq ans répondrait que ce devrait être une seule et même personne », glisse malicieusement le député Christian Paul, proche de la maire de Lille. « On ne pourra répondre à cette question qu’une fois le gouvernement connu », évacue de son côté le député François Lamy, conseiller spécial d’Aubry.
La situation obligerait Hollande à nommer la patronne du PS, appréciée dans l’opinion, à la tête d’un gros ministère, sans quoi il n’est pas improbable qu’elle retourne sous son beffroi. Mercredi, il l'a désignée « chef de file » lors du “conseil politique restreint” (regroupant les ténors du parti et les proches de Hollande), sans que personne comprenne vraiment ce que cela voulait dire. « Il est en train de faire rôtir tout le monde, comme Mitterrand à l’époque », se marre un haut fonctionnaire socialiste.
Malgré les doutes de certains sur la capacité de Jean-Marc Ayrault à être l’homme de la situation, le président du groupe socialiste à l’Assemblée apparaît toujours le choix prioritaire du nouveau président. Selon le député et président de l’Ardèche, Pascal Terrasse, « dans une période compliquée, avec plein de ponts et une lassitude au bout d’un an de campagne médiatique, Ayrault est l’incarnation de la solidité et de la fidélité à Hollande ». « Il était déjà le chef des députés, il serait logique qu’il soit aussi le chef des candidats à la députation », remarque la députée de Gironde, Michèle Delaunay, qui vient de voir Alain Juppé déclarer forfait face à elle.
Et si la cote de Manuel Valls remonte dans les gazettes, notamment après le retour sur le devant de la scène d’une condamnation de Jean-Marc Ayrault à six mois de prison avec sursis et 30 000 francs d’amende, pour favoritisme, en 1997, cette éventuelle nomination sème le trouble dans les esprits socialistes. Un député de l’aile gauche du parti regrette une « opération diversion siglée Euro RSCG », comme pourrait l’être aussi selon lui la démission d’Alain Bauer, vieil ami de Valls, de l'Observatoire national de la délinquance, qui dépend de Matignon. Et puis surtout, Valls premier ministre, ce serait « virer à droite », donc « le meilleur moyen de perdre ».

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