Deux économistes à la renommée mondiale se sont invités à l’Assemblée nationale pour soutenir la taxe portée par leur confrère Gabriel Zucman. Ils se sont attelés à démystifier les fantasmes du camp du capital autour de cet impôt qui leur paraît plus que nécessaire.
Dans son offensive contre la taxe Zucman, Bernard Arnault ne défend ni l’intérêt général ni une forme de rationalité économique : il représente une forme de radicalisation du capital qui n’hésite pas à voir son salut dans l’extrême droite.
La proposition d’un impôt plancher de 2 % sur le patrimoine des ultrariches, devenue le symbole de la bataille pour une meilleure équité fiscale, provoque l’ire du camp du capital. Pourtant, certains économistes pro-business commencent à la défendre, non sans arrière-pensées.
Ce très discret lieu d’entreposage de biens de luxe a fermé les yeux pendant des années sur les combines qui pouvaient s’y tramer. Après une avalanche de scandales, le canton de Genève, propriétaire du port franc, a lancé un grand ménage en 2015. Sans renier totalement son ADN.
Le Sénat a rejeté une proposition de loi visant à taxer à 2 % le patrimoine des grandes fortunes. Faire payer davantage d’impôts aux ultrariches est une idée qui fait pourtant consensus, à en croire une étude qui s’appuie sur les cahiers de doléances du grand débat national de 2019.
Le ministre des finances dispose d’un patrimoine proche de 21 millions d’euros, record sans précédent sur plus de dix ans avec son collègue de l’industrie Marc Ferracci. « Je suis d’une gauche qui n’aime pas l’impôt », dit-il. Au vu des chiffres, on comprend mieux pourquoi.
Lors d’une audition au Sénat, le propriétaire et PDG de l’armateur a défendu l’avantage fiscal astronomique dont bénéficie son groupe et qui coûte des milliards à l’État. Une position difficile à tenir en ces temps de troubles budgétaires.
Invité de « À l’air libre », l’économiste Gabriel Zucman détaille la proposition de loi écologiste visant à instaurer un impôt minimum sur les ultrariches adoptée à l’Assemblée nationale le 20 février, et dont il a été à l’initiative.
À l’été 2022, Bernard Arnault panique à l’idée qu’un député LFI arrive à la tête de la commission des finances de l’Assemblée nationale. Des représentants du patron de LVMH demandent alors à faire classifier son dossier fiscal personnel. L’administration a résisté à cette demande extraordinaire.
Après huit ans de guerre juridique, la Cour de justice de l’Union européenne a définitivement condamné l’entreprise à verser 13 milliards d’euros, jugeant ses arrangements fiscaux avec l’Irlande illégaux. C’est le plus gros redressement fiscal de l’histoire en Europe.
De l’Italie aux États-Unis, nombre de pays, pressés par les contraintes budgétaires et inquiets des risques d’instabilité financière et politique créés par les inégalités, entendent taxer les plus grandes fortunes. Un seul village résiste à ce changement d’époque : la France.
Marlene Engelhorn, membre de la famille fondatrice du géant de la chimie BASF et militante pour une taxation des plus riches, va redistribuer son héritage de 25 millions d’euros à plus de 70 organisations. Une décision prise par un conseil de 50 citoyens.
Le Rassemblement national propose d’exonérer d’impôt sur le revenu les moins de 30 ans. Mais la mesure ne ciblera in fine que les jeunes ménages aisés et aura, du reste, toutes les chances d’être inconstitutionnelle.
Couplé à une taxe anti-exil fiscal, un impôt sur la fortune est possible à l’échelle d’un seul pays comme la France, estime l’économiste Gabriel Zucman. Il n’y a donc pas de fatalité, selon lui, à subir l’exode fiscal des plus riches si l’on veut les taxer davantage.
Le bouclier tarifaire était censé protéger les ménages. Il a surtout protégé les surprofits de quelques acteurs. Le rapport de la Cour des comptes sur ce dispositif illustre jusqu’à la caricature le gaspillage de l’argent public.
Annoncé en fanfare à l’automne 2021, le projet de fiscalité mondiale minimum présenté par l’OCDE n’est plus qu’une ombre. Une partie du texte entrée en application début 2024 a été vidée de sa substance. Et les États-Unis mettent leur veto sur la taxe sur les géants du numérique.