Il y a une « patte » Serge Audier, dont les plus fidèles de ses lecteurs sont conscients et s’amusent parfois entre eux, impressionnés par une érudition jamais surplombante, guidée qu’elle est par un sens et un goût évidents pour la pédagogie de ce spécialiste des idées politiques. Administrant sans relâche la preuve de ses affirmations, à travers une profusion de références en trois ou quatre langues, il cherche régulièrement à « déshomogénéiser » des courants de pensée (le républicanisme, le socialisme pré-marxiste, le néolibéralisme…) et à sortir de l’oubli des approches et des auteurs qui seraient pourtant précieux dans les débats intellectuels contemporains (solidaristes, socialistes libéraux, libertaires de gauche…).
Ce souci de briser les images d’Épinal de la philosophie politique, d’en complexifier les récits dominants et de rendre justice aux « perdants » ensevelis sous une Histoire souvent écrite par les vainqueurs se retrouve tout au long du nouveau livre d’Audier, La Société écologique et ses ennemis. Cette somme de plus de 700 pages, qui se lit néanmoins avec facilité, est tout entière tournée vers la mise au jour d’une « voie écologique, […] toujours minoritaire et bloquée », qui a existé « au sein des mouvements luttant pour l’égalité et l’émancipation de tous ». Les critiques à la fois écologistes et progressistes de la société capitaliste industrielle ont existé quasiment depuis les débuts de celle-ci, nourrissant également des propositions d’alternatives dont la richesse, une nouvelle fois, a largement été oubliée.
Les affinités écologiques de la gauche
Depuis toujours, la gauche est un creuset de théories et de luttes écologiques, mais celles-ci ont été recouvertes par d’autres récits d’émancipation, au nom des Lumières, des luttes sociales et contre les discours réactionnaires de défense de la nature. C’est ce que démontre le philosophe Serge Audier dans La Société écologique et ses ennemis. Entretien vidéo.
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Fabien Escalona et Jade Lindgaard
28 mai 2017 à 11h21