Entreprises

Accor: le très gros appétit du fonds Colony Capital

Les fonds d'investissement Colony Capital et Eurazeo ont annoncé le 5 mai avoir pris 17,52% du capital d'Accor et leur intention de monter jusqu'à 30% dans le groupe hôtelier. Mais qui est ce fonds Colony? Retour sur cet étrange investisseur et son dirigeant français Sébastien Bazin, qui achète aussi bien des immeubles que Carrefour, Buffalo Grill ou le PSG.

Martine Orange

Mais qui est Colony Capital ? La question ne manque pas de se poser, au moment où ce fonds d'investissement vient de partir à l'assaut du capital d'Accor. Associé avec Eurazeo, très lié à l'histoire de la banque Lazard, le fonds, qui détenait déjà 10% du groupe hôtelier, a annoncé lundi 5 mai s'être renforcé à hauteur de 17,52% du capital. Et ils ont l'intention de monter rapidement jusqu'à 30%, prenant de court le conseil du groupe, averti seulement le 30 avril. Dès lors, toutes les interrogations reprennent, comme il y a un mois quand le même Colony Capital était devenu premier actionnaire de Carrefour aux côtés de Bernard Arnault (par ailleurs PDG de LVMH), sur la nature et les ambitions de cet investisseur un peu particulier.
Officiellement, Colony Capital est un fonds d'investissement des plus classiques, spécialisé dans l'immobilier. Créé en 1991, il a séduit plus de 200 investisseurs, institutionnels et particuliers, pour lesquels il a investi plus de 39 milliards de dollars dans 8.500 opérations différentes. Aux Etats-Unis, la société s'est engagée dans des grands programmes immobiliers. On la retrouve propriétaire de beaucoup d'immeubles et d'hôtels à Las Vegas, à New York, en Floride, en Californie. Elle a aussi des vignobles.
En France, Colony Capital a un profil beaucoup plus atypique. Le fonds est bien sûr présent dans des opérations immobilières. Il est propriétaire d'immeubles un peu partout en France, notamment en Ile-de-France et à Marseille. Il investit beaucoup à la Défense : il est actionnaire notamment de Lucia, l'ancienne société immobilière du promoteur Christian Pellerin. Il possède aussi des vignobles dans le Bordelais, le Château Lascombes, producteur de Margaux. Mais à côté de cela, il a pris des participations significatives voire majoritaires dans des groupes comme Buffalo Grill, Carrefour, le groupe de casinos Lucien Barrière, Accor et le club de football du Paris-Saint-Germain. Même si à chaque fois la justification d'intérêts immobiliers a été avancée, Colony Capital semble très loin de ses terres.
« Ça, c'est la patte de Sébastien Bazin », assure un banquier qui dit bien le connaître. Issu d'une famille bourgeoise, qui a connu de graves revers de fortunes à la suite de mauvaises affaires dans l'immobilier, ce dernier n'a pas son pareil pour évoluer dans le monde des affaires parisien. Connaissant les codes et les usages, il sait aussi les travers de ce milieu récemment converti aux délices de la finance internationale. Volubile, volontiers séducteur, il se fraye un passage partout auprès des riches et des puissants – on le dit notamment au mieux avec Nicolas Bazire, directeur général de LVMH et proche de Nicolas Sarkozy. Est-ce cette faculté d'adaptation, est-ce autre chose ? En tout cas, Sébastien Bazin, comme responsable de l'Europe, semble avoir acquis une assurance et une indépendance par rapport à la gestion du fonds américain qui ne semblent pas exister ailleurs. Ainsi, à côté de l'argent qu'il gère pour Colony, il a créé en juillet 2003 un autre fonds en partenariat avec Eurazeo : Colyzeo. Un premier tour de table en 2003 a réuni de 229 millions d'euros, un second lancé en 2007 vise le milliard d'euros. Au gré des opérations, c'est tantôt l'argent de Colony, tantôt celui de Colyzeo, tantôt les deux qui sont mobilisés. «Cela lui donne une liberté d'action beaucoup plus grande que s'il devait en référer à chaque fois au comité d'investissement américain », remarque un observateur.

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