Dossier Guadeloupe et Martinique, de crise en crise
Née d’un refus de l’obligation vaccinale avant d’embrasser des revendications sociales, une nouvelle poussée contestataire a saisi la Guadeloupe et la Martinique. Environnementales ou économiques, politiques ou policière, les îles des Antilles vont de crise de crise, que le quinquennat Macron n’aura pas permis de résoudre. Notre dossier.
Une partie de la jeune génération de l’île s’est exprimée de manière inédite, autonome, en érigeant des barrages, en ralliant l’intersyndicale ou en participant aux nuits d’émeutes. Intellectuels et membres de l’Éducation nationale rappellent l’état de « désespoir » qui les a gagnés.
L’intersyndicale à la tête de la grève générale lancée le 22 novembre en Martinique poursuit ses actions contre l’obligation vaccinale des professionnels du secteur médicosocial et contre la vie chère. Les blocages routiers ont cédé la place à des « négociations » avec l’État et les grands patrons notamment.
Lors d’une rencontre jeudi à Pointe-à-Pitre, les élus de l’île et les membres du collectif ont convenu de la nécessité d’une commission interministérielle pour négocier. Au ministère des outre-mer, on en reste à la position initiale : les revendications ne relèvent pas de l’État.
Le porte-parole du LKP (« Collectif contre l’exploitation ») est en première ligne de la mobilisation sociale qui agite l’île depuis deux semaines. Contrairement à ce qu’affirme l’exécutif, il estime que l’État est bien concerné par toutes les demandes du collectif.
Le barrage de La Boucan est l'une des places fortes de la contestation actuelle sur l’île. À Sainte-Rose, le barrage n’est pas tant tenu au nom de la lutte contre l’obligation vaccinale que pour des problèmes bien plus larges. Eau, chlordécone, vie chère, mépris de la métropole... autant de sujets que la visite express du ministre des outre-mer a exacerbés.
Alors qu’une crise sociale secoue l’île antillaise, le ministre des outre-mer, Sébastien Lecornu, a lâché le mot : « autonomie ». Une question statutaire qui parcourt la population depuis des années et cristallise son identité, mais qui peine à aboutir.
Le gouvernement se dit prêt à « évoquer » l’autonomie de la Guadeloupe, après avoir retardé l’obligation vaccinale pour les soignants et les pompiers sur l’île ainsi qu’en Martinique.
Déclaré en Guadeloupe et en Martinique cette semaine, l’usage du couvre-feu est resté très ciblé en France jusqu’à l’état d’urgence sanitaire de 2020. Il a toutefois été utilisé pendant la guerre d’Algérie, en 2005 et localement par certains maires, au nom de la lutte contre la délinquance des mineurs.
Au départ, des soignants et des pompiers hostiles à l’obligation vaccinale ont lancé une grève illimitée. Désormais, la mobilisation déborde. Dans ses revendications, également sociales, dans sa violence, avec des pillages et des incendies. Dimanche, des membres du Raid et du GIGN doivent arriver sur l’île, paralysée.
Alors que l’école de la République connaît de nombreux dysfonctionnements dans l’archipel, accentués par la crise du Covid, le privé hors contrat prend ses aises. Or cette offre éducative a un coût, et contribue à creuser les inégalités.
Plus que toutes les autres anciennes puissances impériales, la France est travaillée en profondeur par la question coloniale, structurant la relation qu’elle entretient avec le monde et façonnant le regard qu’elle porte sur elle-même. Un article de la « Revue du crieur », dont le numéro 19 vient d’être publié.
La Martinique traverse une nouvelle vague de Covid-19 d’une extrême gravité. Malgré la forte circulation du virus et les moyens limités des hôpitaux surchargés, la population reste en grande majorité réticente à la vaccination. Une situation qui ravive la défiance des locaux vis-à-vis des autorités de la métropole. Reportage.
Depuis trois semaines, la Martinique fait face à une quatrième vague de Covid-19 particulièrement meurtrière. À l’hôpital Pierre Zobda-Quitman à Fort-de-France, tous les lits de réanimation sont occupés alors que le pic de l’épidémie n’est pas encore atteint. Reportage.
Alors que le système hospitalier est déliquescent et saturé de longue date, le gouvernement a choisi la voie des restrictions de liberté, inédites à cette échelle dans les Dom. Un bras de fer est engagé avec la population, rétive à la vaccination.
En Guadeloupe, des milliers d’habitants vivent au rythme des « tours d’eau », des coupures programmées, ou n’ont tout simplement pas d’eau au robinet depuis plusieurs années. Les habitants subissent des coupures prolongées, même en pleine pandémie de Covid-19. Face à la catastrophe sanitaire, les pouvoirs publics sont accusés d’incurie. Premier volet de notre série.