Leader mondial du ciment, le groupe Lafarge a été mis en examen, jeudi 28 juin, en tant que personne morale, pour « financement d’une entreprise terroriste », « complicité de crimes contre l’humanité », « violation d'un embargo » et « mise en danger de la vie d'autrui ». L'entreprise est soupçonnée d’avoir financé entre 2011 et 2015 plusieurs organisations terroristes, dont l’État islamique, dans le seul but de maintenir en activité une usine en Syrie. Huit cadres dirigeants de l'entreprise sont déjà mis en examen dans cette affaire. Retrouvez toutes nos enquêtes.
Comment une multinationale française en est-elle venue, par pure cupidité, à financer le terrorisme islamiste pour maintenir en activité une usine en Syrie ? Que savaient les services secrets français ? À partir de documents d’enquête inédits, Mediapart a reconstitué les dessous du scandale Lafarge.
La multinationale du ciment, accusée d’avoir financé en connaissance de cause le terrorisme islamiste en Syrie pour y maintenir ses activités, a plaidé coupable aux États-Unis, acceptant de payer une amende de 778 millions de dollars.
Alors que la cour d’appel de Paris avait annulé en 2019 la mise en examen pour « complicité de crimes contre l’humanité » de la multinationale Lafarge, la Cour de cassation a invalidé, mardi 7 septembre, la décision. La mise en cause de la multinationale pour « financement du terrorisme » est par ailleurs confirmée.
Une conversation téléphonique interceptée par la douane judiciaire en octobre 2017 entre l’ex-patron du géant Lafarge, Bruno Lafont, et un communicant parisien lève le voile sur « l’inquiétude » qui a gagné l’état-major de la multinationale, accusée d’avoir financé l’État islamique en Syrie. Jusqu’où va aller l’enquête judiciaire, c’est-à-dire jusqu’à qui ? Révélations.
Évoquant des « risques majeurs » de concertation frauduleuse, de pression ou d’intimidation financière sur des témoins, la juge Charlotte Bilger a réclamé le placement en détention provisoire de Bruno Lafont, mis en examen pour « financement du terrorisme ». En vain.
Les juges d’instruction parisiens chargés de l’enquête pour « financement du terrorisme » visant la multinationale Lafarge ont identifié plus de 15 millions de dollars suspects dont une partie importante a financé, entre 2011 et 2015, des organisations terroristes en Syrie (y compris l’État islamique) dans le seul but de maintenir l’activité d’une usine sur place. Révélations.
Il y a une curieuse absence depuis le début des révélations sur le financement de Daech par Lafarge : celle des actionnaires, et notamment le groupe Bruxelles Lambert, contrôlé par Albert Frère et le Canadien Paul Desmarais, et l’homme d’affaires égyptien Nassef Sawiris. Ni les uns, ni les autres ne sont connus pour être des actionnaires passifs. Aujourd’hui, tout est organisé pour qu’ils soient oubliés.
Le 20 juillet 2016, l’Assemblée nationale, par l’intermédiaire d'une mission d’information présidée par le député Jean-Frédéric Poisson, blanchissait le groupe Lafarge de toute compromission avec des organisations terroristes. Enquête sur un naufrage parlementaire.
L’un des dirigeants du groupe Lafarge qui a supervisé le marchandage financier avec l’État islamique, permettant au géant du ciment de poursuivre son activité en Syrie en 2013 et 2014, est un fervent soutien de Marine Le Pen, dont il a défendu les couleurs lors des dernières municipales à Paris.
Deux anciens cadres de Lafarge et un responsable de la sécurité du groupe, par ailleurs ancien candidat du Front national, ont été mis en examen, vendredi 1er décembre, pour « financement du terrorisme » dans l’enquête sur ses liens avec l’État islamique. Le groupe français a maintenu en 2013 et 2014 ses activités en Syrie dans une zone de conflit tenue par Daech.