Annoncé dès la réélection d’Emmanuel Macron puis reporté, le projet de loi sur l’immigration a été adoptéle 19 décembre 2023 par l’Assemblée nationale. Pour trouver une majorité, le ministre de l’intérieur a multiplié les mains tendues aux Républicains et repris plusieurs antiennes de l’extrême droite.
Malgré la censure partielle par le Conseil constitutionnel, la loi immigration « détricote » le droit d’asile de manière significative. Un sujet beaucoup moins abordé que le droit des étrangers, mais tout aussi important.
Procédures opaques, précarité, méconnaissance de leur situation par le personnel universitaire... Les étudiants exilés cumulent les obstacles. La loi immigration, en partie censurée par les « Sages » le 25 janvier, n’arrange pas leurs conditions.
La droite d’opposition et l’extrême droite, qui avaient permis l’adoption de la loi immigration, crient au « hold-up démocratique » après la large censure du Conseil constitutionnel. Grâce aux manœuvres d’Emmanuel Macron, elles peuvent désormais tranquillement pousser leurs curseurs idéologiques dans le débat public.
Le Conseil constitutionnel a censuré une trentaine d’articles de la loi portée par Gérald Darmanin et votée avec les voix de l’extrême droite. Associations, syndicats et collectifs de sans-papiers saluent une victoire partielle mais réclament le retrait de la loi « dans sa globalité ».
35 des 86 articles du projet de loi ont été totalement ou partiellement censurés par les « Sages », notamment de nombreuses mesures de durcissement adoptées en décembre sous la pression de la droite.
Chercheurs à l’Institut national d’études démographiques, Marie-Victoire Bouquet et Loïc Trabut considèrent que le texte « fait peser des risques importants sur l’accompagnement des personnes âgées en perte d’autonomie », en tarissant le vivier d’aides à domicile et en les précarisant.
Alors que le Conseil constitutionnel se prononce le 25 janvier sur le texte voté fin décembre, l’écrivain sénégalais, Goncourt 2021, pointe dans un texte pour Mediapart le risque de cette « loi indigne » : « Constituer des catégories de bons et de mauvais étrangers. »
Des dizaines de milliers de personnes ont manifesté partout en France pour demander le retrait de la loi asile et immigration. Alors que le Conseil constitutionnel pourrait en censurer certains articles, les manifestants dénoncent une politique qui pave la voie à l’extrême droite.
Newsletters
Découvrez les newsletters de Mediapart
Recevez directement l’info de votre choix : Quotidienne, Hebdo, Alerte, À l’air libre, Écologie, Enquête …
Dans leur livre « L’exil, toujours recommencé », la sociologue Anne-Claire Defossez et l’anthropologue Didier Fassin livrent une chronique de la frontière franco-italienne et des routes migratoires qui y mènent. Ils redoutent les effets « délétères » de la loi immigration.
Inspirée de propositions d’extrême droite, la loi sur l’immigration a été votée le 19 décembre. 201 personnalités appellent à manifester partout en France dimanche. Dans « À l’air libre », Sophie Binet (CGT), Jacques Toubon (ancien Défenseur des droits), l’écrivaine Alice Zeniter et Edwy Plenel expliquent pourquoi ils en seront.
Le texte conditionne certaines prestations sociales à une durée de présence sur le territoire. Le collectif Nos services publics estime qu’entre 110 000 et 700 000 personnes vont basculer dans la pauvreté, voire la très grande pauvreté, dont des dizaines de milliers d’enfants.
Après l’adoption de la loi immigration, le président a renvoyé ses errements politiques à la décision du Conseil constitutionnel, assumant d’avoir fait voter un texte dont certaines dispositions sont contraires aux principes fondamentaux.
Des dizaines de manifestations ont eu lieu en France ce dimanche à l’initiative de 400 collectifs. À Paris, des milliers de personnes ont dénoncé un texte « xénophobe » et « dangereux ».
Jeanne Barseghian, maire de la capitale alsacienne, a annoncé entrer en « résistance » contre la loi immigration et intégration. La municipalité participe à une saisine du Conseil constitutionnel et étend ses aides sociales communales aux personnes sans papiers.
Alors que la France adoptait la loi immigration, l’UE trouvait, au même moment, un accord sur cinq règlements pour durcir les passages aux frontières. Mais tout s’est déroulé, dans un débat français en vase clos, comme si les textes européens n’existaient pas.
Des dirigeants de 32 conseils départementaux ont annoncé refuser d’appliquer les nouvelles conditions fixées sur le versement de l’allocation personnalisée d’autonomie. En parallèle des appels se multiplient à gauche pour organiser « la riposte ».