Dossier Ces djihadistes dont la France ne veut pas
Prisonniers des Irakiens, des Syriens, des Kurdes et des Turcs, des djihadistes français et leurs familles sont une épine dans le pied pour Paris. Alors qu'Emmanuel Macron a refusé de rapatrier les familles des djihadistes français de Syrie, la situation semble intenable dans la durée.
Guillaume Kapo, suspecté d’avoir été l’un des geôliers des otages français de l’État islamique, fait l’objet de deux mandats d’arrêt. La justice sait parfaitement où il est : dans une prison syrienne. Mais la France ne veut pas le rapatrier.
La rapporteuse de l’ONU vient d’interroger les autorités françaises sur le transfert de sept Français de l’EI condamnés à mort par la justice irakienne. En juin, Mediapart avait raconté la volonté de Paris de créer en urgence un tribunal pénal international et les errements de sa diplomatie après le refus d’Emmanuel Macron, contre l’avis de ses services, de rapatrier les ressortissants djihadistes.
Après qu’Emmanuel Macron a refusé de rapatrier les familles de djihadistes français de Syrie, le Quai d’Orsay réfléchit à la création d’un tribunal pénal international basé en Irak. Il y a urgence : les Kurdes ont la plus grande difficulté à assurer la garde des détenus djihadistes tandis que la situation sanitaire se dégrade dans les camps où, selon nos informations, sont retenus plus de 300 enfants.
Quelle que soit la réalité des charges reconnues à l'encontre des djihadistes français, la manière dont s’applique la justice irakienne suscite la polémique. Comme le révèle Mediapart, l’opération consistant à faire juger ces ressortissants encombrants en Irak a été pensée depuis Paris et réalisée « sans l’intervention visible de la France ».
Les grands-parents de deux enfants français de djihadistes, blessés en Syrie, ont saisi la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) afin de faire condamner la France pour refus de les rapatrier. Emmanuel Macron a refusé tout programme de rapatriement.
« Il n’y a pas un programme de retour des djihadistes qui est aujourd’hui conçu », a assuré Emmanuel Macron lors d’un débat mardi avec des élus de la région Grand Est à l’Élysée. Pourtant, les services des ministères des affaires étrangères, de la défense, de l’intérieur et de la justice travaillaient bien depuis l’automne 2018 au retour des djihadistes détenus par les Kurdes de Syrie.
Depuis l’effondrement du califat, on annonce le retour massif des djihadistes français, avec femmes et enfants. En réalité, les retours se font au compte-gouttes : seulement sept adultes ont rejoint l’Hexagone cette année, et au total 64 hommes et femmes depuis 2016.
Prisonniers des Irakiens, des Syriens, des Kurdes et des Turcs, des djihadistes français et leurs familles sont une épine dans le pied pour Paris. Un peu moins d’une centaine d’individus, dont, selon nos informations, 32 mineurs, sont concernés. Faut-il les laisser juger sur place ou réclamer leur extradition ?