L’intersyndicale organise mardi 6 juin la quatorzième journée de mobilisation, contre un texte qui entrera en vigueur le 1er septembre. Sans le dire ouvertement, elle cherche à enjamber cette échéance, pour continuer de peser dans le rapport de force avec l’exécutif.
Sans grande surprise, l’institution de la rue de Montpensier a rejeté la deuxième demande de référendum d’initiative partagée. Désormais, les opposants à la réforme des retraites se concentrent sur la proposition de loi visant à abroger le recul de l’âge de départ, qui doit être discutée à l’Assemblée nationale le 8 juin.
Les manifestants se sont retrouvés en masse pour cette Journée internationale des travailleurs et des travailleuses, où les syndicats ont affiché leur unité pour la première fois depuis 2009. S’ils ne savent pas comment arracher la victoire contre la réforme des retraites, ils sont encore des centaines de milliers à tenter de le faire.
En ce 1er-Mai, l’autrice Diaty Diallo estime, dans un texte pour Mediapart, que malgré la bataille « perdue » contre la réforme des retraites, « on a récupéré une chose en chemin : un nouveau degré d’intensité et d’urgence dans la manière dont on veut prendre soin de ce monde et de ce qui y vit ».
Pour les travailleurs et travailleuses mais, surtout, contre la réforme des retraites. Ce 1er-Mai s’annonce colossal à l’appel d’une intersyndicale unie. En trois mois, le mouvement social a permis à ses artisans de tisser des liens, parfois hors des sentiers syndicaux, pour maintenir la lutte et en construire de nouvelles, partout en France.
Depuis le passage de la réforme des retraites par le 49-3, de nouvelles formes de contestation ont éclos. Des casserolades aux soirées de soutien, avec une place importante donnée au happening. Certains artistes, et notamment des rappeuses et des rappeurs, ont choisi d’user de leur art pour contrer cette réforme.
Face au rejet, par le Conseil constitutionnel, de la première demande de référendum d’initiative partagée et les doutes persistants sur la rédaction du deuxième, les députés socialistes avaient rédigé en catastrophe une nouvelle mouture. En vain : Emmanuel Macron avait déjà promulgué sa réforme.
Pris de court par la publication de la loi au Journal officiel, dans la nuit de vendredi à samedi, les organisations syndicales et les partis de gauche dénoncent cet empressement et mettent le cap sur le 1er mai. Le président Macron s’exprimera lundi soir.
Dans les rues de Paris, des centaines d’étudiants et de travailleurs ont manifesté avant la décision du Conseil constitutionnel. Quand les « Sages » ont validé la loi dans ses grandes lignes, toutes et tous ont redoublé de synonymes pour dire leur rage face à ce qu’ils considèrent comme la « violence institutionnelle » de trop.
Partout en France, les cortèges ont largement diminué pour la douzième journée de mobilisation contre la réforme. Mais si tous les regards sont tournés vers le Conseil constitutionnel, qui rendra sa décision vendredi, la colère ne s’est pas éteinte.
Si l’exécutif se félicite déjà de voir la mobilisation contre la réforme des retraites décliner pour cette douzième journée d’action, la lutte aura payé de bien des manières. En trois mois, elle a libéré une folle énergie, inédite depuis bien des années. Ode à un mouvement hors-norme.
Après trois mois de mouvement social contre la réforme des retraites, la radicalité du pouvoir rend nécessaire une révision de la stratégie syndicale. Les grandes journées de manifestation ont atteint leurs limites. Comment aller plus loin ? En visant un objectif : rendre le monde du travail ingouvernable.
Inédit par sa force, le mouvement social contre la réforme des retraites l’est aussi par un antagonisme qui le traverse : il y a eu d’un côté beaucoup de monde en manifestation et de l’autre, la grève générale n’a pas eu lieu. Cette séquence est éclairante sur l’état du monde du travail, des syndicats et de leur capacité à mobiliser.
La dématérialisation accrue des procédures auprès de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) complique l’accès des retraités, souvent issus de l’immigration, à leur pension. Un collectif d’associations qui les accompagne alerte sur ces difficultés.
Dans les cortèges de cette onzième journée nationale de mobilisation contre la réforme des retraites, les colères étudiante et lycéenne commencent à déborder les routines syndicales. Certains jeunes rongent leur frein et demandent un durcissement du mouvement qui ne vient pas. Surtout, ils souhaitent élargir les revendications aux préoccupations écologiques, féministes et antiracistes.
La onzième journée de mobilisation contre la réforme des retraites a rassemblé 200 000 personnes de moins en France selon le ministère de l’intérieur, quand les syndicats annoncent un niveau semblable au 28 mars, soit deux millions de personnes. Une douzième journée est annoncée le 13 avril alors que les crispations entre l’exécutif et les syndicats atteignent leur paroxysme.