Dossier Violences sexuelles : la justice en question
Mise en cause pour ses résultats jugés insuffisants en matière de violences sexuelles, la justice est elle-même en difficulté pour gérer plusieurs situations de harcèlement en son sein.
En janvier 2020, Yasemin Cetindag avait porté plainte pour menaces de mort réitérées par son ex-conjoint. Malgré les nombreux éléments inquiétants recueillis par la police, l’homme a écopé d’un simple rappel à la loi. La mère de quatre enfants a été tuée trois mois plus tard.
Six semaines après l’acquittement en appel des policiers accusés de viol dans l’affaire dite du « 36 quai des Orfèvres », le procureur général près la Cour de cassation, François Molins, a annoncé qu’il refusait la demande de pourvoi dans l'intérêt de la loi. Le verdict, contesté, est définitif.
Dans un courrier au procureur général près la Cour de cassation, douze avocates et juristes spécialistes des violences sexuelles dénoncent les stéréotypes qui imprègnent la décision d’acquittement des deux policiers dans l’affaire du « viol du 36 », et sollicitent un pourvoi en cassation « dans l’intérêt de la loi ».
Le parquet de Paris a classé sans suite pour prescription la plainte pour viol sur mineur de 15 ans visant l’ancien ministre Jean-Michel Baylet. Une décision attendue mais riche d’enseignements sur le fonctionnement de la justice et l’indifférence politique aux violences sexuelles.
Le mois dernier, Mediapart avait révélé le message audio laissé par mégarde par un policier à une Parisienne qui avait porté plainte pour agression sexuelle. Il parlait d’elle comme d’une « grosse pute ». Pour la justice, les preuves sont insuffisantes pour poursuivre le fonctionnaire.
Isabelle a été victime de plusieurs coups de feu tirés par son ex-compagnon en février 2021. Malgré de nombreuses alertes et une garde à vue, le parquet avait classé ses trois plaintes. Il avait aussi rendu à cet homme les armes qu’il a ensuite utilisées contre elle.
L’institution a été confrontée à un magistrat accusé de propos et gestes déplacés. Elle doit se défendre d’avoir manqué à ses obligations d’employeur dans un autre cas, et promet un vaste plan de formation.
L’avocate Nathalie Tomasini reprochait à l’actuel ministre de la justice un geste jugé menaçant et des propos tenus avant sa nomination au gouvernement, en marge du procès d’un féminicide en février 2020.
Selon nos informations, l’actuel ministre de la justice est visé par une plainte pour menaces physiques et violences psychologiques, déposée le 21 septembre par l’avocate Nathalie Tomasini. Elle lui reproche un geste jugé menaçant et des propos tenus avant sa nomination au gouvernement, en marge du procès d’un féminicide en février 2020.
Alors que huit femmes témoignent dans « Libération » contre PPDA, notre collègue Marine Turchi publie « Faute de preuves. Enquête sur la justice face aux révélations #MeToo » (Seuil). « À l’air libre » reçoit le procureur Matthieu Bourrette et Isabelle Rome, magistrate et haute fonctionnaire à l’égalité femmes-hommes au ministère de la justice.
Le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a demandé la rétrogradation d’un vice-procureur soupçonné de harcèlement sexuel. Une sanction particulièrement sévère. Une greffière et une magistrate avaient dénoncé son comportement en 2019, alors qu’il exerçait au Parquet national financier (PNF).
Julie a accusé 22 pompiers de viol, alors qu’elle était adolescente. Seuls trois sont aujourd’hui poursuivis, et pour atteinte sexuelle. La Cour de cassation doit examiner le dossier mercredi 10 février. Pour Mediapart, la jeune femme revient sur cette affaire, érigée en symbole par les associations féministes.
Une information judiciaire ouverte le 25 septembre pour « harcèlement moral au travail et harcèlement sexuel » après la plainte d’une greffière visant un ancien vice-procureur du Parquet national financier (PNF) a été dépaysée à Lille, a appris l’AFP mardi de source judiciaire, confirmant une information du Point.
Alors qu’elle cherche à regagner la confiance des citoyens, la justice est elle-même en difficulté pour gérer plusieurs situations de harcèlement en son sein. Quatre affaires différentes montrent que ses procédures internes sont inadaptées, sa culture administrative dépassée, et les victimes déclarées peu écoutées.
Une vice-présidente du tribunal de Versailles est accusée de harceler les greffières et de malmener les justiciables aux audiences qu’elle préside, d’après des informations obtenues par Mediapart. Elle n’a reçu qu’un simple avertissement de sa hiérarchie.