Tous nos articles sur l’OPA lancée par Veolia contre son rival : de la surprise aux coups bas en passant par les tribunaux, Bercy et l’Elysée, le récit d’une guerre annonciatrice d’un immense gâchis industriel et social.
L’enquête judiciaire pour « trafic d’influence » dans le dossier Suez-Veolia pourrait menacer, en pleine campagne présidentielle, Alexis Kohler, déjà englué dans le conflit d’intérêts du dossier MSC. Deux affaires qui mettent en cause les pratiques de certains membres de la haute fonction publique.
Le parquet national financier (PNF) enquête depuis mi-juin suite à une plainte de plusieurs syndicats du groupe Suez, suspectant notamment le secrétaire général de l’Élysée et des responsables de Veolia et d’Engie de trafic d’influence autour de l’OPA de Veolia sur Suez, a appris l’AFP vendredi de source judiciaire.
La bataille entre Veolia et Suez a mis en lumière les allégeances et les passe-droits au temps d’une présidence « jupitérienne ». Elle illustre la déliquescence d’un capitalisme prêt à s’affranchir de toute règle, pour conforter des rentes menacées.
Cela a été les grands sujets oubliés de la bataille entre Suez et Veolia. Il n’a jamais été question de politique de l’eau, de préservation des ressources, de service public. Par sa position dominante, Veolia pourtant va se retrouver en situation d’imposer sa loi aux collectivités.
L’opération n’a aucun sens économique ou industriel. Pourtant, le démantèlement de Suez, géant de l’eau et des déchets, par son rival Veolia est en cours. L’exécutif a largement prêté main-forte à des intérêts privés dans cette prédation. Retour sur une histoire de haine, de pouvoir et d’argent.
Le secrétaire général de l’Élysée a refusé par deux fois de répondre à la convocation de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale pour expliquer son rôle dans l’OPA de Veolia sur Suez. Son refus conforte les soupçons dans ce dossier : Suez-Veolia est bien une affaire d’État.
Dix millions d’euros ! La révélation des honoraires touchés par Gérard Mestrallet comme médiateur entre Suez et Veolia crée l’inquiétude. Et voir un ancien président organiser le dépeçage de son groupe illustre un nouveau côté obscur de ce dossier.
Révoltés par le sort réservé à Suez, les syndicats CGT, CFDT et CTFC ont déposé plainte ce 22 avril pour trafic d’influence auprès du Parquet national financier. Ils attendent que la justice fasse la lumière sur l’OPA de Veolia, « orchestrée de bout en bout », selon eux.
Le fonds Ardian, censé devenir actionnaire du nouveau Suez, refuse de participer à l’accord de principe discuté et signé sans lui. Motif : le nouveau Suez ne serait pas en mesure de se développer. Sans Ardian, l’accord entre Suez et Veolia peut-il subsister ?
« Dans cette bataille, nous avons toujours été seuls. » Au lendemain de l’accord annoncé entre Suez et Veolia, les salariés de Suez dénoncent une trahison, le rôle trouble du pouvoir et les menaces subies même par les administrateurs du groupe. Pourquoi le pouvoir macronien s’est-il exposé si fortement dans une opération qui ne peut qu’aboutir à une casse sociale et industrielle dans les deux groupes ? Enquête.
En lançant une OPA hostile contre Suez, le PDG de Veolia avait pour objectif de reprendre la main sur un calendrier qui lui échappait. Mais il est en train de provoquer des réactions en chaîne, déstabilisant ses soutiens et aboutissant à ce que l’Élysée voulait éviter : le dossier Suez-Veolia est désormais une affaire politique.
Dans l’espoir de faire taire les critiques contre son projet de fusion avec Suez, Veolia a sommé 16 économistes, chercheurs et universitaires de révéler les liens éventuels qu’ils auraient avec son rival. Cette manœuvre d’intimidation illustre la fébrilité du groupe, paralysé dans ses projets, mais aussi la grave dérive actuelle contre la liberté d’expression.
L’attaque est sans précédent dans le monde des affaires parisien. Des saisies ont eu lieu jeudi aux sièges de Veolia, Engie et Meridiam. Suez a obtenu auprès du tribunal de commerce de Nanterre de pouvoir saisir « tout document » afin de recueillir les preuves d’une action concertée entre les trois protagonistes.
Les salariés de Suez emportent une première victoire. Veolia va être obligé par une décision de la cour d’appel de les informer et de lever le flou entourant son projet de prise de contrôle. Le temps devient un des facteurs clés dans cette bataille entre les deux groupes.
Rien ne colle dans la version officielle donnée par le gouvernement sur la cession Suez-Veolia. Les nouveaux éléments collectés par Mediapart montrent, en dépit des démentis, que l’Élysée s’est directement impliqué dans le dossier. Et que les cartes, comme le dénoncent les salariés de Suez, « étaient truquées dès le début ». Révélations.
Officiellement, le gouvernement était opposé à la cession de Suez à Veolia, votée lundi au conseil d’Engie. Mais en coulisses, le pouvoir a tout fait pour organiser son impuissance, comme si on lui forçait la main, allant jusqu’à demander aux administrateurs de la CFDT de ne pas voter.