Au début des années 2000, l'entreprise Ikea s'est lancée dans un vaste système de surveillance et d'espionnage de ses salariés, et même de clients, grâce à des liens tissés avec des (ex)-policiers. Nos révélations.
Le détective privé qui travaillait pour l'entreprise Ikea, mise en examen pour l'espionnage de ses salariés, cachetonnait aussi chez Quick. La chaîne de restauration jure qu'il s'agissait de récupérer des données sur ses franchisés, pas sur ses employés. Des pratiques de toute façon illégales.
Quatre policiers sont mis en examen pour avoir cherché dans le fichier Stic des renseignements sur des recrues à Avignon. L'IGPN, la police des polices, n'est pour l'heure saisie que de ce seul cas.
Le patron d'Ikea France a été mis en examen dans l'affaire d'espionnage des salariés. Son prédécesseur a subi le même sort, bien qu'il ait assuré avoir tout ignoré de ces pratiques et suggéré aux enquêteurs que le dossier aurait été supervisé en direct par le responsable “sécurité” d'Ikea-monde.
De l’affaire Prism au scandale Ikea en passant par les boîtes mails hackées des eurodéputés et les écoutes téléphoniques illégales, Mediapart explique les enjeux de cette surveillance généralisée et les recours que peuvent avoir les citoyens.
La filiale française d'Ikea ne s’est pas contentée de traquer ses salariés : elle a enquêté sur des clients ou de simples relations commerciales. Mediapart a retrouvé des Suédois espionnés pour avoir contesté la livraison tardive de leur cuisine. En 2009, un Parisien a été ciblé parce qu'il râlait contre une armoire en mauvais état.
Certains magasins Ikea ont offert des cadeaux à des policiers. Un document récupéré par Mediapart montre qu'à Gonesse, en banlieue parisienne, le directeur lui-même a distribué des bons d'achat de 100 euros. A « Paris-Nord », les accointances entre le responsable sécurité du magasin et certains policiers étaient patentes, d'après des courriels internes en possession de Mediapart. Sur le dos des salariés ?
Non content d'espionner ses salariés en passant par des détectives privés, Ikea a utilisé des infiltrées dans son magasin de Franconville en 2010 et 2011. L'objectif : surveiller des syndicalistes FO chevronnés. Mediapart a retrouvé l'une de ces infiltrées, recrutées par une société spécialisée dans l'intelligence économique. Nous publions aussi le « Retour d'expérience » rédigé par cette officine à l'issue de l'opération. « On se croirait dans un film d'espionnage !» réagit la CFDT.
Depuis les révélations sur l'espionnage des salariés, des hommes de la maison-mère ont débarqué dans la filiale française d'Ikea et repris la main sur une direction fragilisée. Des grèves éclatent, des dépôts sont bloqués, des explications sont demandées.
L'ancien patron d'Ikea France, Jean-Louis Baillot, a été mis en disponibilité mercredi, à la suite des révélations de Mediapart. Une ancienne directrice des ressources humaines de la filiale française a subi le même sort. Il s'agit de «mieux pouvoir coopérer avec les autorités (judiciaires)», affirme l'actuel directeur général d'Ikea France. Lundi, Mediapart révélait que les méthodes employées par le groupe pour fliquer ses salariés étaient, dans un cas au moins, connus de Jean-Louis Baillot et de sa DRH.
Une enquête préliminaire a été ouverte dans l'affaire d'espionnage chez Ikea. Mediapart examine le cas du magasin de Brest, inauguré en 2008. Des courriels inédits prouvent qu'au moment des recrutements, plus de 190 noms ont été transmis par le responsable sécurité d'Ikea France à une officine privée. Mission : « Dire ce qu’il en retourne ».
En 2003, Ikea s'est lancé dans une vaste entreprise de surveillance de salariés et de clients. Après les révélations du Canard enchaîné, Mediapart publie une série de nouveaux mails accablants pour la multinationale. Objet des recherches : les comptes bancaires, le train de vie, le passé de proches des salariés. Des liens tissés avec des policiers auraient aussi permis à l'entreprise de recueillir des informations secrètes sur une enquête judiciaire en cours.
Alors qu'une information judiciaire a récemment été ouverte dans l'affaire d'espionnage chez Ikea, des syndicats de Castorama montent à leur tour au créneau. Le directeur du magasin d'Antibes, condamné à de la prison avec sursis pour avoir fouillé dans les antécédents judiciaires de plusieurs agents de sécurité, n'a pas été sanctionné par sa hiérarchie. Pour les syndicats, Casto « cautionne » de graves atteintes à la vie privée.