Dans un rapport publié mardi, le Défenseur des droits rend public pour la première fois le cadre d’emploi des « moyens intermédiaires de défense », tout en délivrant des données chiffrées concernant leur utilisation par les forces de l’ordre.
C'est la petite histoire des flashballs, telle qu'elle a étéofficiellement lancée en juillet 1995 par... Claude Guéant. A l'époque directeur général de la police nationale (DGPN), l'actuel secrétaire général de l'Elysée signe le premier texte portant sur «l'acquisition et l'utilisation du fusil Flashball». D'autres instructions suivront, qui élargiront le cadre d'emploi de cette arme de plus en plus utilisée et controversée. Jusqu'à en faire, par glissements successifs, un élément essentiel de la panoplie policière. Avec des drames en série, dont plusieurs cas d'éborgnement de jeunes manifestants.
Blessé par un tir de flashball le 21 juin 2009 à Paris, Clément Alexandre, un Rouennais de 30 ans, a assigné le préfet de police de Paris devant le tribunal administratif mardi. Une démarche inédite qui vise selon le jeune homme à « taper à un niveau de responsabilité plus élevé que celui de la responsabilité individuelle du flic ».
Le gendarme qui, le 7 octobre 2011, a éborgné avec son flashball un enfant de 9 ans à Mayotte, est renvoyé devant la Cour d’assises de Mayotte pour « violences aggravées ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente ». C’est une première.
Dans son dernier rapport d'activité, la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) revient en détail sur plusieurs bavures causées par l'usage du flashball, et demande un usage plus limité et mieux encadré de cette arme.
Le premier procès du flashball se tient à Nantes les 6 et 7 mars. Est jugé un policier, et avec lui une arme aux effets potentiellement dévastateurs. En novembre 2007, Pierre, 16 ans, est gravement blessé lors d'une manifestation. Deux ans plus tard, Joachim, à Montreuil, se fait lui aussi tirer dessus. L'un et l'autre perdent la vue d'un œil. Entretien pour évoquer la violence subie et les efforts pour surmonter la peur.
Joachim Gatti, a été blessé le 8 juillet 2009 par un tir de flash-ball, et a perdu un œil. «Il m'en reste un et avec lui une haine sourde», a-t-il fait lire au cours de la manifestation organisée le 13 juillet 2009. Mediapart a recueilli l'enregistrement du texte de Joachim Gatti lu par un ami. Depuis 2005, au moins six personnes ont connu le même sort.
Un policier encagoulé. Des Flashball en expérimentation. Un lycéen grièvement blessé à l’œil qui s’écroule. Et un comité de soutien qui utilise Internet comme arme. Les événements nantais, en marge de la loi LRU, soulèvent de nombreuses questions sur l’actuel maintien de l’ordre à la française.
Usage dévoyé du flashball, formation rudimentaire : les témoignages des policiers, lors du procès qui s'est ouvert mardi à Nantes, révèlent la face cachée de cette arme. « Avec le flashball, reconnaît l'un d'entre eux, c’est quasiment impossible de tirer précisément.»
Poursuivi pour avoir tiré sur un manifestant, un policier a été relaxé par le tribunal correctionnel de Nantes, ce jeudi 3 avril. Son acte n'est pas « manifestement illégal », selon le jugement qui excuse le brigadier en raison de son manque de formation juridique et pratique. « C’est un permis de crever les yeux », estime l’avocate du plaignant.
Mediapart a enquêté sur cette soirée d'été qui a tourné au drame dans une ville de Seine-Saint-Denis où les tensions avec la police sont récurrentes. Dans le collimateur des forces de l'ordre: des Montreuillois engagés contre les arrestations de sans-papiers, les expulsions de logement et la précarité.
Depuis près d’un mois, un mouvement social contre la vie chère agite le dernier-né des départements français. L'Etat ne lésine pas sur l'envoi de renforts de policiers. Mercredi, un homme est mort dans une manifestation, après avoir été visé par un tir de flashball.
Pour Fabien Jobard, chercheur au CNRS, l'arme, conçue comme un outil individuel de légitime défense d'usage exceptionnel, est devenue l'instrument collectif du maintien de l'ordre, un moyen de maintenir les protestataires à distance.
L'auteur du tir de flashball ayant blessé gravement un jeune homme au visage,le 8 juillet à Montreuil (Seine-Saint-Denis), a violé les règles d'usage de cette arme, selon l'enquête de la «police des polices». Cela fait pourtant deux ans que les incidents de ce type se multiplient – plusieurs personnes avaient, elles aussi, perdu un œil dans des conditions similaires à Nantes, Villiers-le-Bel, Toulouse... Rien n'y fait, malgré les avertissements répétés qui soulignent la dangerosité de ces armes.