En 2010, Philippe de Morand, prêtre du diocèse de Lyon, est condamné à six mois de prison avec sursis pour agression sexuelle sur un jeune de vingt ans. Alerté, le cardinal de Lyon n’en a jamais informé la justice, se contentant d’éloigner le prêtre vers le diocèse de Nanterre. Mediapart a pu consulter des pièces du dossier d’instruction qui révèlent une véritable méthode Barbarin.
“Congés sabbatiques”, mutations silencieuses à la campagne ou à l’étranger, réintégrations et promotions dans une nouvelle paroisse ou un autre diocèse. C’est un véritable mode opératoire que l’on observe dans la majorité des affaires de pédophilie au sein de l’Église de France. Dans le silence des évêchés, sans que la justice civile ne soit saisie.
Plusieurs affaires de pédophilie et d'abus sexuels révélées dans l’Église concernent les milieux traditionalistes. Mediapart a pu consulter en avant-première le Livre noir de la Fraternité Saint-Pie-X, publié par l’association des victimes Avref, et a enquêté sur ces mouvements où règne l’omerta. Sous le regard passif des autorités ecclésiastiques.
Dix ans après de premiers signalements et une plainte au parquet de Paris, de nouveaux témoins accusent Monseigneur Tony Anatrella, prêtre, conseiller au Vatican et psychanalyste, d’abus sexuels. Mediapart a rencontré plusieurs victimes et recueilli des documents qui montrent que l’archevêché de Paris était alerté depuis 2001.
En 2005, le prêtre Dominique Spina est condamné à quatre ans de prison ferme pour le viol d’un lycéen de 16 ans. Sous la responsabilité de Mgr Aillet, évêque de Bayonne, ce prêtre exerce aujourd’hui un ministère important, à la tête de sept clochers dans le diocèse de Toulouse.
Jamais, en vingt-cinq ans, le diocèse de Bayonne n'a alerté la justice des agissements coupables du père S., tout en étant parfaitement au courant. Il a continué à être nommé à des postes où il était en contact avec des enfants. Ce n'est qu'alertée par l'enquête de Mediapart que la hiérarchie a décidé de le lâcher, après avoir fait le ménage dans ses archives internet.
Accusé d'actes de pédophilie et d'agression sexuelle sur majeur, un ancien religieux de la communauté Saint-Jean, qui a reconnu les faits en 2015, est jugé ce vendredi à Chalon-sur-Saône. Des documents consultés par Mediapart révèlent que des supérieurs de cette fraternité contestée savaient tout du mal-être et des agissements de leur frère, mais n'ont jamais alerté les autorités.
Disparu dans la nature puis retrouvé par les gendarmes, le père D. a avoué en garde à vue des attouchements sur mineur. Il a été mis en examen ce samedi 23 avril, et une information judiciaire pour agression sexuelle sur mineur a été ouverte à Montauban.
À Lyon puis à Montauban, où il avait été éloigné, les autorités diocésaines ont été alertées dès 2002 puis les années suivantes de la dangerosité pour les jeunes du père D., sans jamais alerter la justice. Or, entre 2005 et 2009, le père D. a fait au moins une nouvelle victime mineure. Une enquête préliminaire vient d’être ouverte à Montauban.
Les scandales de pédophilie révélés par l'association La Parole libérée ne se limitent plus au diocèse de Lyon et à « l’affaire Barbarin ». Les témoignages se multiplient dans l'Hexagone. Après des années de refoulement et de traumatismes, des victimes brisent le silence et mettent l’Église face à ses responsabilités. Témoignages, de Sainte-Foy-lès-Lyon à Toulouse, en passant par Rouen.
Un prêtre a été condamné pour agressions sexuelles sur mineurs, le 12 février 2016. Ce cas met à mal la défense du cardinal Barbarin, qui fut alerté par une victime dès 2003 sans pour autant saisir la justice. Nous avons retrouvé le prêtre octogénaire.
Dans le diocèse de Lyon, près de soixante personnes affirment aujourd'hui avoir été abusées par le père Bernard Preynat, responsable scout de 1970 à 1991. Regroupées au sein de l'association La parole libérée, les victimes prennent la parole, mènent l'enquête et interpellent l'opinion publique. Dans leur sillage, d'autres affaires sortent au grand jour. Une boîte de Pandore ouverte en seulement trois mois.
Sur une cinquantaine d'anciens scouts lyonnais qui se disent victimes du père Preynat, seuls quatre peuvent espérer obtenir justice. Pour les autres, les faits sont prescrits : ils auraient dû parler avant l'âge de 38 ans. Ce 10 mars, les députés ont voté une réforme des délais de prescription pour les crimes et les délits. Mais n'ont pas modifié les règles touchant à la pédophilie.
Une enquête préliminaire a été ouverte pour « non-dénonciation de crime » et « mise en danger de la vie d'autrui » en marge de l'affaire d'un prêtre mis en examen pour des agressions sexuelles.