Après avoir acheté la société canadienne Uramin 1,8 milliard d’euros en 2007, le groupe nucléaire Areva est obligé de reconnaître qu’elle en vaut presque zéro aujourd’hui. Enquête sur un gigantesque fiasco.
Pourquoi le groupe nucléaire s'est-il précipité, en pleine bulle boursière, pour acheter un petit groupe minier objet de toutes les spéculations? Pourquoi la production d'uranium promise au moment de ce rachat de 2,5 milliards de dollars n'est-elle pas au rendez-vous? Deux députés vont tenter d'avoir quelques éclaircissements.
Rarement une acquisition a tourné à un tel fiasco. Après avoir acheté la société canadienne Uramin 1,8 milliard d’euros en 2007, le groupe nucléaire est obligé de reconnaître qu’elle en vaut presque zéro aujourd’hui. Depuis le rachat, de nombreux salariés semblent avoir eu des doutes sur cette opération qui ressemble à une escroquerie. Enquêtes, contre-enquêtes, rapports officiels et officieux se sont succédé, mais le mystère reste entier.
En six mois, la société Uramin, cotée à la bourse de Toronto, est passée de 400 millions à 2,5 milliards de dollars ! Comment en pleine spéculation, Areva a-t-il pu acheter sans précaution cette petite société qui n’avait pas produit le moindre gramme d’uranium ? Récit d’une folle histoire boursière qui s’apparente à une arnaque de grande envergure. Deuxième volet de notre enquête.
Avant l’élection présidentielle de 2007, Anne Lauvergeon est inquiète : si Nicolas Sarkozy l’emporte, son ami Martin Bouygues a toutes les chances d’entrer au capital du groupe nucléaire, voire d’obtenir son démantèlement. La mise aux enchères d’Uramin par les vendeurs canadiens lui permet de lancer une contre-attaque éclair pour renforcer son pouvoir, en passant outre toutes les règles et les procédures de contrôle. Et l’administration laisse faire.
Ce fut la dernière surprise dans l’acquisition d’Uramin. Non seulement, les gisements n’avaient pas les ressources attendues, mais les droits d’exploitation n’étaient pas toujours assurés. Pour l’aider face aux gouvernements africains, Areva va recourir à la diplomatie parallèle. Patrick Balkany en tant qu’émissaire officieux de l’Elysée, l’homme d’affaires belge Georges Forrest comme « facilitateur », vont prendre le dossier Areva en Afrique. Dernier volet de notre enquête.
Une enquête judiciaire pour « présentation ou publication de comptes inexacts ou infidèles », « diffusion d'informations fausses ou trompeuses », « faux et usage de faux » a été ouverte sur Areva, à la suite d'un signalement par la Cour des comptes. Retour sur nos enquêtes déjà publiées.
Sept ans après, le rachat d'Uramin, payé au prix fort par Areva, reste hautement radioactif. La Cour des comptes s’est saisie du dossier et a décidé de faire un signalement auprès du parquet financier. Un autre rapport interne à Areva avait été fait en décembre 2011 pour tenter de comprendre cette affaire. Mediapart analyse ces deux documents.
Qui a demandé une enquête confiée à une officine sur le mari d’Anne Lauvergeon ? Vendredi 16 mai, le tribunal de Paris tentait de démêler le vrai du faux dans cette sombre affaire d’espionnage au sein d'Areva, sur fond de scandale Uramin. Compte rendu d’audience.
Le groupe nucléaire annonce une perte d'environ 1,5 milliard d'euros cette année et des milliers de suppressions d'emplois. L'effondrement de la filière après Fukushima n'y est pas pour grand-chose. Areva solde le fiasco de l'EPR mais aussi l'acquisition, dans des conditions extravagantes, d'une société minière canadienne. La commission des finances de l'Assemblée enquête.
Alors que les enquêtes judiciaires avancent sur le scandale Uramin, les témoignages de salariés sont accablants. Ministère des finances, CEA, DCRI, Quai d’Orsay... ont été avertis par des cadres désespérés de ne pouvoir faire passer leur message dans le groupe : les mines rachetées étaient inexploitables. Les responsables de l’acquisition ont préféré ignorer les études.
Quatre jours avant le second tour de l’élection présidentielle de 2007, les responsables d’Areva ont passé un accord à Londres avec les vendeurs de la société canadienne pour fixer le calendrier de l’OPA, comme le révèle un mail interne publié par Mediapart. Les autorités de tutelle ont alors été totalement maintenues dans l’ignorance. Cet accord fixe tout sauf le prix. La spéculation sur le titre, alimentée par les vendeurs eux-mêmes, redoublera après cet engagement.
Au moment même où Areva négocie le rachat d’Uramin, le groupe monte un grand projet du nom de Songaï. Son objectif : bâtir une grande holding minière, basée en Afrique du Sud, qui travaillerait dans toute l’Afrique avec des filiales nationales, associant des intérêts privés africains. Les gisements d’Uramin serviront de point d’appui à la création de ces premières joint-ventures. Mais là où Areva affichait l’ambition d’exercer son métier minier autrement, ces créations vont faire resurgir les pires pratiques de la Françafrique.
Sous la forte incitation de la justice, la direction d’Areva s’est finalement portée partie civile dans le dossier Uramin. Des listes d’actionnaires de la société canadienne, analysées par Mediapart, montrent que tout le monde financier opaque s’est invité au banquet des grands fauves lors de l’OPA de juillet 2007. Les soupçons de corruption et de délits d’initiés prennent de plus en plus forme.
Olivier Fric, époux de l'ancienne présidente d'Areva, a été mis en examen pour délit d'initié et blanchiment dans le cadre de l'enquête sur les conditions du rachat de la société minière canadienne Uramin. À la suite d’achats de titres, il a réalisé une plus-value de 299 380 euros.
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