De l’Odyssée aux romans de Joseph Conrad, le naufrage inspire des aventures et des héros mémorables. La décision de la capitaine Carola Rackete de forcer l’entrée du port de Lampedusa pour mettre en sécurité les naufragés recueillis à bord s’est inscrite dans cet imaginaire puissant. C’est ainsi qu’elle a fait basculer Matteo Salvini du mauvais côté de l’histoire, celui du démagogue qui joue avec la vie des gens.
La mort de Toni Morrison est tout le contraire d’une disparition. C’est une invitation à résister à la prolifération des discours de haine. Son œuvre, qui déploie le lieu de la langue et de l’imaginaire comme un champ de bataille, est une arme contre l’ensorcellement raciste et sexiste de nos sociétés. Dans la nuit xénophobe, elle nous apparaît telle une constellation comme le suggère le titre d’un de ses livres : Playing in the Dark. Christian Salmon témoigne sur celle qui fut l’une des initiatrices du Parlement international des écrivains.
L’entrée dans le port de Lampedusa du Sea-Watch 3 de Carola Rackete est une victoire symbolique contre les politiques migratoires européennes soutenues par les nationalistes et les libéraux. La capitaine allemande a, par son geste, plus fait pour la bataille des idées en Europe que tous les spin doctors de Bruxelles qui veulent nous vendre un grand récit pour le continent.
En Italie, le triomphe électoral de la Ligue de Matteo Salvini ravive la polémique sur l’idéologie du parti. Mouvement néofasciste, populiste, ou simplement souverainiste ? Comment Salvini a-t-il réussi à imposer son agenda aux médias traditionnels ? Quel rôle attribuer aux réseaux sociaux et aux algorithmes dans son irrésistible ascension ?
Depuis deux ans, Emmanuel Macron, qui avait fait de la « bienveillance » le mantra de sa campagne et de « la parole rare » la règle de sa communication est devenu le président le plus bavard et le plus brutal de la Ve République. Au risque de se banaliser, mais aussi de se contredire ou de se dédoubler. Portait du président en ventriloque.
Élu depuis 100 jours, le président d’extrême droite brésilien Jair Bolsonaro voit déjà sa crédibilité mise à mal par des soupçons de corruption et par ses liens avec des milices armées. Pour détourner l’attention, Bolsonaro suscite depuis trois mois des polémiques incessantes via Twitter. Ses partisans l’ont surnommé « le mythe ». Mais qu’y a-t-il derrière le mythe ?
L’inculpation de Roger Stone, dont le procès aura lieu en novembre, est un élément clé de l’enquête sur les ingérences russes dans la présidentielle de 201l. Il s’agit aussi de l’épilogue théâtral d’une ère dont il est le symbole. De Nixon à Trump, le flamboyant spin doctor révèle le cynisme et la corruption de la scène politique américaine.
Le 14 février 1989, l’ayatollah Khomeiny condamna à mort Salman Rushdie dont le seul crime à ses yeux était d’avoir écrit un roman qu’il jugeait blasphématoire. Ce fut l’acte inaugural d’une affaire planétaire, sous laquelle le roman a été enseveli. Trente ans après, et une fois le tumulte retombé, il est temps de (re)lire Les Versets sataniques, un texte qui nous parle de notre monde globalisé et des conflits culturels qu’il génère.
L’affaire Benalla poursuit Emmanuel Macron comme son ombre. Les « gilets jaunes » le cernent tels les oiseaux de Hitchcock appelant à sa démission. Si le président s’efforce de donner le change en multipliant les interventions publiques, la confusion des signes est à son comble et les révélations de l’affaire Benalla sont en train de virer à la crise de régime.
Le mouvement des « gilets jaunes » met en lumière le discrédit qui frappe tous les récits officiels. Ce qui a été refoulé depuis 30 ans resurgit sous une forme chaotique, sauvage mais résolue. Une sorte de contre-puissance obscure, celle d’un monde social qui résiste aveuglément au néolibéralisme et à son agenda.
Les résultats des élections de mi-mandat montrent que Donald Trump bénéficie du soutien d’une base régulière de partisans convaincus, qui ne se laissent pas convaincre par des arguments rationnels ni par des leçons de morale. Le président américain cherche moins à rassembler qu’à cliver. Pour cela, tous les coups sont permis : insultes, connivence et mauvaise foi. Dernier exemple en date : un tweet contre Macron, à peine arrivé à Paris.
La Ve République, 60 ans d’âge, est-elle à l’agonie ou bien vivante ? Les deux à la fois, comme les morts-vivants. Réduite à l’état de zombie, elle s’est retournée contre les finalités que lui avaient assignées ses fondateurs et contre ceux qui, à gauche, ont voulu la réformer. Elle se survit à l’état de mythe qui, loin de protéger le président, l’expose au discrédit.