Onze militants indépendantistes ont été placés en garde à vue mercredi dans le cadre d’une enquête ouverte par le parquet de Nouméa, notamment pour association de malfaiteurs. Parmi eux : la principale collaboratrice de Roch Wamytan, le président du Congrès de Nouvelle-Calédonie.
Plusieurs militants indépendantistes, considérés comme les « commanditaires présumés » des révoltes qui embrasent la Nouvelle-Calédonie depuis mi-mai, ont été arrêtés mercredi. En s’entêtant à conduire une révision constitutionnelle qui ne verra finalement pas le jour, le chef de l’État a fait perdre des décennies à l’archipel.
Les familles des dix militants indépendantistes kanak tombés dans une embuscade tendue par des colons en 1984 en Nouvelle-Calédonie n’ont jamais obtenu justice. Retour sur un scandale d’État.
Le conflit généré par la révision du corps électoral – suspendue après la dissolution de l’Assemblée – ravive de tous côtés les « vieux démons » du racisme, qui ne sauraient occulter d’autres réalités : celle des discriminations ordinaires envers les Kanak, et surtout, celles du métissage et du vivre ensemble, qui tournent lentement la page de l’époque coloniale.
En Nouvelle-Calédonie, mais aussi en Martinique, en Guadeloupe et en Guyane, la dissolution de l’Assemblée a pour effet immédiat de figer revendications indépendantistes et velléités d’émancipation, aggravant ainsi la crise démocratique qui touche de longue date ces territoires.
L’historienne Isabelle Merle décrit l’ampleur du legs colonial en Nouvelle-Calédonie et les voies, étroites mais possibles, pour imaginer une décolonisation juste et véritable. Entretien.
Deux hommes ont été incarcérés mercredi pour des actes qui n’ont entraîné aucune blessure ni dégât matériel chiffré. Pour justifier la sévérité des peines, le tribunal correctionnel de Nouméa a invoqué les « circonstances » insurrectionnelles.
En privilégiant l’usage de la force au compromis politique, en évoquant l’idée de soumettre au référendum national la question du dégel du corps électoral, et en niant les racines du problème, le chef de l’État renoue avec les démons de la République.
Mercredi 15 mai, dans le quartier de Tuband à Nouméa, un élu loyaliste, Philippe Blaise, a été aperçu au milieu d’une milice armée de battes de baseball, de barres de fer et d’un couteau. Le vice-président de la Province Sud, membre des Républicains calédoniens, les appelle « mes mecs ».
Plusieurs témoignages recueillis par Mediapart font part de l’absence de contrôle des policiers sur des citoyens d’origine européenne armés, voire de « deals » passés entre eux.
Ni le séjour éclair du chef de l’État ni ses déclarations ambiguës sur le dégel du corps électoral n’ont arrangé le quotidien du quartier populaire de Rivière-Salée, meurtri par deux semaines de crise. Habitants indépendantistes et loyalistes s’accordent pour dire que le président français « a mis de l’huile sur le feu ».
Au terme d’une visite éclair dans l’archipel, le président de la République n’a rien annoncé de concret, si ce n’est qu’il donnait « quelques semaines » aux indépendantistes pour ramener le calme et reprendre le dialogue. Fuyant ses propres responsabilités, il a surtout démontré son entêtement à nier la racine coloniale du problème.
Mobilisé dans son quartier de Nouméa, Darewa Dianou, le fils d’Alphonse Dianou, leader indépendantiste tué à Ouvéa en 1988, raconte à Mediapart son quotidien depuis le début de la crise. Les difficultés à « canaliser » les jeunes, la peur des milices et la détermination de ceux qui luttent sur le terrain, malgré l’absence de perspectives.
Mediapart a retrouvé les proches de l’étudiant kanak de 19 ans tué par balle à Nouméa le 15 mai. Son cousin, présent pendant le drame, raconte que Jybril a été la cible d’un civil armé alors qu’il ne représentait aucun danger. L’auteur présumé du tir s’est rendu aux autorités.
Les habitants d’origine européenne ont formé des groupes peu expérimentés militairement, parfois fortement armés. Le haut-commissaire de la République les tient pour responsables de la mort de trois Kanak, mais soutient leur existence.
Que se passe-t-il en Nouvelle-Calédonie ? Qui est responsable de cette flambée de violence jamais vue depuis des décennies ? Comment en sortir ? Réponses dans « À l’air libre ».