En 1959, Raymond Queneau publiait Zazie dans le métro. La petite fille a ses épigones contemporains : Laure Murat « devenue plus enragée que Zazie » ou Jane Sautière, qui traversent rames et lignes pour nous offrir des tranches de vie sociale, des éloges de la lecture et un voyage intérieur.
Un thriller dans la forme, un défi à la loi des probabilités (et à la loi tout court mais c’est plus fréquent). Noël à Zurich et Pâques au cimetière : remarquablement informé, Montecristo démonte un système financier, interroge le courage et les lâchetés d’aujourd’hui. Mais Martin Suter jure qu’il ne fait que raconter des histoires.
La mère était la grande absente, dans les livres antérieurs de Christine Angot. Au mieux, une silhouette passante. Un amour impossible, récit apparemment simple, s’ouvrant à Châteauroux années 60, réconcilie intime et sociétal, une mère et sa fille, bouleverse sans pathos. Extrait en fin.
« La forme d'une ville/Change plus vite, hélas ! que le cœur d'un mortel », écrivait Baudelaire face au Paris moderne. C’est une disparition qu’observent dans deux livres Thomas B. Reverdy et Alexandre Friederich, celle de Detroit, incarnation urbaine d’une « apocalypse lente » et parabole : « l’occasion troublante, normalement impensable, de contempler les ruines de notre propre civilisation. »
Refusé par plusieurs éditeurs français, dont Gallimard qui le publiait depuis 1996, refusé par son éditeur allemand, La Zone d’intérêt de Martin Amis, roman situé à Auschwitz, paraît ces jours-ci chez Calmann-Lévy. Comme le dit si bien Martin Amis lui-même, « l’écrivain a le droit de s’emparer de l’Histoire, encore faut-il qu’il en soit capable »…
« Évidemment, l’Holocauste pose problème à tous ceux qui se penchent sur la question. » Peut-on encore écrire sur ce passé qui conditionne nos modes de pensée contemporains ? Telle est la question centrale du roman-monde que publie l’écrivain islandais Eiríkur Örn Norđdahl, Illska (Le Mal), sans doute l’un des plus ambitieux de cette rentrée littéraire. Critique et premier chapitre du livre.
Roman majeur de la rentrée littéraire, Boussole (Actes Sud) de Mathias Énard ouvre les voies de l'Orient des lumières. Une prose somptueuse porte ce projet littéraire et politique hors norme. Cet appel du grand large transmet une soif d’altérité, ausculte les différences, opte pour la coexistence: «Le monde a besoin de diversité, de diasporas», dit l'un de ses personnages, Sarah.
Journaliste par nécessité, Roger Vailland a écrit quelque 3 000 articles. Si l'on connaît ses récits de militant au service de la cause du peuple, il a été, avant guerre, un observateur critique et perspicace de la crise des années 1930 et de la montée du fascisme. Et se souvenir qu'en 1964, pour son ultime article, il fustigeait ceux qui parlent « de planification, d'études de marché, de prospective… » « Comme citoyen », il exigeait qu'on lui « parle politique. »
Il a fallu une cure de désintox à l'héroïne, à la fin de l'hiver 1942, pour que Roger Vailland s'engage dans la Résistance. Il en tirera son premier roman, Drôle de jeu, où les résistants sont certes portraiturés en implacables combattants, mais aussi en jouisseurs, menant grand train avec l'argent parachuté de Londres. Une description iconoclaste de la Résistance, plébiscitée dès 1945 par les anciens résistants pour son réalisme.
À rebours des représentations habituelles, la sociologue Anne Lambert montre que les zones pavillonnaires ne sont pas seulement des espaces de « petits Blancs » tentés par le Front national et démontre à quel point les politiques publiques d’accession à la propriété possèdent des effets politiques déterminants.
Écrivain et journaliste, bolchevik, libertin et héroïnomane, Roger Vailland (1907-1965) fit son retour en librairie avril dernier, avec la sortie d'un recueil de ses articles, Sacré Métier ! Pourtant, il eût été opportun de se souvenir, peu après les attentats de janvier, qu'il fut aussi un des rares écrivains du XXe siècle à se situer explicitement en héritier des Lumières. Portrait en trois volets d'un écrivain majeur du siècle dernier.
Si les formes démocratiques traditionnelles (le parti, le syndicat, le vote, etc.) sont en déclin, l’engagement civique, lui, ne faiblit pas. Selon Hélène Balazard, auteure d’« Agir en démocratie », inclure dans la société politique les plus démunis et remettre les relations humaines au cœur de la politique est à la fois nécessaire et possible.
La journaliste Mona Chollet propose une « odyssée de l’espace domestique », dans laquelle les sirènes maléfiques ressembleraient plutôt à des fées du logis et le cyclope aveuglé, à toutes les personnes incapables de saisir la sagesse des casaniers.
Tarification à l'acte, intranet RH, self scanning, management par objectifs, benchmarking, lean management, évaluation informatique… Bienvenue dans le monde terrifiant, et largement inefficace, du « management désincarné », étudié par la sociologue Marie-Anne Dujarier. Ou comment, en voulant élaborer des dispositifs standardisés pour encadrer le travail à distance, on finit par en perdre la substance même.
En 1917, au nord de la Nouvelle-Calédonie, éclate une guerre coloniale. La répression tue, emprisonne, disperse. De 1919 à 2011, naît une littérature pour transmettre l’événement. « Les Sanglots de l’aigle pêcheur » restitue aujourd’hui ces textes : magnifiques bouées de sauvetage mental, kanak donc universelles...
Un livre, encore, sur l’affaire Seznec ? Avec désormais une touche FN ? Oui, et Denis Langlois a écrit une indispensable saga sur la real-justice, les médias, et comment une affaire peut rendre fou. Avec une information nouvelle, tue jusque-là.