Le féminisme peut-il servir à énoncer une morale ? L’essai d’Ivan Jablonka entend subvertir les masculinités de domination au nom de la « justice de genre », mais son discours n’évite pas certains effets d’autorité qui desservent son ambition.
Récompensé mardi 5 novembre par le jury du prix Femina, Sylvain Prudhomme, qui a connu les plaisirs du voyage et des croisements, raconte dans Par les routes, son huitième roman, une France qui sait ouvrir sa portière.
Après La Ballade silencieuse de Jackson C. Frank, le nouveau roman de Thomas Giraud s’attache à une autre figure de perdant magnifique. En 1855, au Texas, des colons français lancent une expérience de vie communautaire. Dans Le Bruit des tuiles, l’utopie vire au désastre.
Le premier roman de Marin Fouqué, 77 (Actes Sud), s’attarde là où l’on ne s’arrête pas : en Seine-et-Marne, dans un abribus, sous la capuche d’un jeune homme. Il confirme qu’un nouveau genre est en train de s’inventer, celui du roman périurbain, après Fief de David Lopez et Leurs enfants après eux de Nicolas Mathieu.
C’est un classique de la littérature yougoslave d’une glaçante actualité que les éditions Inculte donnent l’occasion de redécouvrir : publié en 1938, le Banquet en Blithuanie de l’écrivain croate Miroslav Krleža semble parler de l’Europe de 2019.
La pensée dominante des sciences économiques pensait avoir atteint la « fin de l’histoire » avant la crise de 2008 en réalisant une synthèse entre les deux grandes écoles concurrentes depuis les années 1930, la keynésienne et la néoclassique. La crise financière a montré combien cette impression était fausse. Une enquête parue dans le n° 13 de la Revue du Crieur, disponible en librairies et Relay.
Enfant, Patrick Deville était doublement enfermé. Il l’a raconté dans Taba-Taba, son précédent roman. À Mindin et dans le corset qui enserrait sa hanche opérée, il voyageait en lisant. Chaque livre était son « abracadabra », son tour de magie, son tapis volant. Pour écrire Amazonia, il a emprunté des bateaux et a descendu des fleuves avec Pierre, son fils.
Une amie de la famille permet à l’écrivain, 50 ans après la disparition tragique de sa sœur, de faire lien. Avec les siens, avec la vie, avec nous tous.
À Prague, en 1995, un journaliste enquête sur une médium qui recueillerait des pièces de Chopin, sous la dictée du compositeur-revenant. Le doute s’insinue et gagne la partie dans ce roman abouti d’Éric Faye : La Télégraphiste de Chopin.
« Les Alpes comme le boulevard de la liberté » : ainsi Élisée Reclus conclut-il, à 36 ans, cet essai paru en 1866. Il n’est pas encore le géographe universel, libertaire et exilé que l’on connaît. Il s’est formé jusqu’alors par le voyage, les lectures et l’écriture.
La mort de Toni Morrison est tout le contraire d’une disparition. C’est une invitation à résister à la prolifération des discours de haine. Son œuvre, qui déploie le lieu de la langue et de l’imaginaire comme un champ de bataille, est une arme contre l’ensorcellement raciste et sexiste de nos sociétés. Dans la nuit xénophobe, elle nous apparaît telle une constellation comme le suggère le titre d’un de ses livres : Playing in the Dark. Christian Salmon témoigne sur celle qui fut l’une des initiatrices du Parlement international des écrivains.
Fort du soutien inconditionnel dès ses 20 ans, dans l’ex-RDA, de Heiner Müller, Durs Grünbein s’est imposé comme l’un des poètes majeurs de la jeune génération allemande qui a vécu la chute du mur de Berlin. Presque un chant – le choix de ses poèmes paru récemment – restitue le plein retentissement de cette œuvre à son surgissement, à défaut de parfaitement situer leur auteur au regard de la réunification allemande.
Pour la politologue Françoise Vergès, l’œuvre de la récipiendaire du prix Nobel de littérature 1993, décédée dans la nuit de lundi 5 à mardi 6 août, a permis d’entrer dans « l’intimité complexe des personnes réduites en esclavage ». Sa pensée irrigue aujourd'hui la jeune génération de la gauche américaine.
Toni Morrison est morte dans la nuit du lundi 5 au mardi 6 août, à 88 ans. L'Américaine, auteure du roman Beloved, devenu un best-seller mondial, est la première femme afro-américaine à avoir reçu le prix Nobel de littérature, en 1993.
C’est non à l’extinction des espèces, mais à notre capacité à les décrire que s’intéresse l’historien Romain Bertrand dans un livre singulier, où l’on finit par ne plus compter les mots que l’on ne connaît pas. Et si la manière dont nous avons perdu la relation au monde était une affaire de langage ?
Albert Camus rencontra Nicola Chiaromonte (critique littéraire, éditeur, penseur antifasciste italien) à Alger. Et ils ont tenu correspondance pendant 14 ans. L’édition de ces lettres est une plongée dans le monde intellectuel de l’après-Seconde Guerre mondiale et dans l’art de la littérature que ces deux-là partageaient.