Depuis plus de six ans, le pouvoir politique a constamment détourné le regard du dossier, écartant même l’hypothèse d’une commission d’enquête parlementaire sur l'évolution des relations entre Paris et Tripoli et le déclenchement de la guerre de 2011.
L’ancien président de la République Nicolas Sarkozy entame mercredi 21 mars son second jour de garde à vue à Nanterre, dans les locaux de l’Office anticorruption de la police judiciaire. L’ancien ministre de l’intérieur Brice Hortefeux a été entendu mardi sous le statut de « suspect libre ».
Pour tout comprendre de l’affaire libyenne, il faut remonter à 2011 et suivre le fil de nos révélations, faites de documents, d’entretiens et d’avancées issues de la procédure judiciaire, puisque depuis 2013, la justice dénoue les fils de cette affaire hors normes, dont le monde politique ne s'est jamais saisi.
Fabrice Arfi et Karl Laske, qui mènent depuis 2011 l’enquête sur l’affaire Sarkozy-Kadhafi, avaient adressé courant 2017, pour leur livre Avec les compliments du Guide (Fayard), soixante questions à Nicolas Sarkozy qui n’y avait pas répondu. Mediapart les publie en intégralité.
Le placement en garde à vue de l'ancien président Nicolas Sarkozy n'a suscité que de faibles réactions dans les rangs de la droite. Nadine Morano, bien seule sur le front, a raccroché au nez d'un journaliste puis diffusé un message accusant le juge Tournaire de « harcèlement ». Mais le parti s'est contenté d'un communiqué de trois phrases, que plusieurs cadres n'ont même pas relayé.
Omniprésent depuis quelques semaines, l’ancien chef de l’État, qui savait que l’étau judiciaire était en train de se resserrer autour de lui, laissait entendre qu’il pourrait bien, une nouvelle fois, « revenir » en politique...
L’intermédiaire proche de Nicolas Sarkozy, écroué à Londres, a sorti 4 millions d’euros en espèces entre 2006 et 2010, et acheté, en 2011, 475 000 euros de diamants. La perspective de son audition en France effraie dans les milieux politiques de droite qui l’ont protégé.
Grièvement blessé lors d’un attentat, vendredi 23 février à Johannesburg, l’ancien directeur de cabinet de Mouammar Kadhafi avait fait valoir son droit au silence, en 2017, en réponse aux juges français. Mais selon des proches, il envisageait depuis peu de transmettre des informations à la justice.
Interpellé à Londres, dimanche, Alexandre Djouhri a été placé sous contrôle judiciaire. Selon les informations de Mediapart, plusieurs documents saisis à son domicile genevois confirment son rôle dans le paiement d’une commission à l’ancien ministre de l’intérieur.
Sous le coup d’un mandat d’arrêt européen émis par les juges de l’affaire libyenne, l’intermédiaire Alexandre Djouhri a été interpellé dimanche à Londres. Le 23 octobre, le tribunal pénal fédéral suisse a balayé les recours qu’il avait engagés pour empêcher la transmission des pièces saisies à son domicile de Genève.
La note libyenne révélée par Mediapart en 2012, attestant d’une promesse de financement de la campagne de 2007, n’est ni un faux matériel ni un faux intellectuel, selon la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris. Cette décision judiciaire est une défaite pour l’ancien président de la République française.
Selon une interception téléphonique de septembre 2016, Dominique de Villepin a demandé à l’intermédiaire Alexandre Djouhri de « clarifier l’origine des fonds » d’un virement reçu par sa société, Villepin International. Au cœur des interrogations : l’argent libyen qui lui a été reversé par Djouhri et les prestations de conseil de l’ancien premier ministre.
L’Office anticorruption de la police judiciaire a signé, le 5 septembre 2017, un premier rapport accablant dans l’affaire des financements libyens de Nicolas Sarkozy. Éric Woerth, trésorier de 2007 et actuel président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, est mis en cause. Les juges ont par ailleurs saisi plusieurs biens immobiliers de Claude Guéant.
Fabrice Arfi et Karl Laske ont rassemblé dans un livre six ans d’enquête sur l’affaire Sarkozy-Kadhafi. « L’histoire d’une haute trahison »: la corruption d’un clan politique français par une dictature étrangère. Retour sur une histoire hors normes. Jamais, dans la longue chronique des corruptions républicaines, nous n’avons contemplé un tableau aussi dévastateur.
Nicolas Sarkozy est, en mars 2011, l’initiateur et le plus farouche acteur d’une intervention armée en Libye qui aboutit au renversement et à la mort de Kadhafi. Lancée sur la base de fausses informations, l’entreprise guerrière est un fiasco.
L’enquête s’accélère. Éric Woerth, l’ancien trésorier de la campagne de 2007, a été entendu comme suspect par les enquêteurs et plusieurs secrétaires et responsables au QG de Nicolas Sarkozy ont été placés en garde à vue et perquisitionnés. Ils ont confirmé des rétributions en espèces et l’abondance de cash.