Mardi, dès 6 heures du matin , les six bâtiments du campus central de l’Université de Strasbourg ont été bloqués par ses étudiants. C’est le troisième blocage depuis le début du mouvement des retraites, mais le premier d’une telle efficacité. En fin de journée, il a été reconduit pour le mercredi 8 mars. Et les revendications vont bien au-delà des retraites.
Après le succès de la mobilisation du 7 mars, les cheminots de Tours et de Saint-Pierre-des-Corps tentent d’organiser leur grève sur le temps long. Et manifestent aussi contre une compagnie ferroviaire vidée de son sens.
Bloquer le pays, c’est la stratégie des syndicats contre le recul de l’âge de départ à la retraite. Une grève prolongée pourrait-elle mettre un coup d’arrêt à la destruction du monde ? Fermer une usine, une infrastructure, ou même une filière d’activité ne revient pas à prendre le deuil. C’est la préparation du monde qui vient.
La brutalité, l’entêtement et la désinvolture de l’exécutif exposent le pays à de grands dangers démocratiques. Seul un alliage entre démocratie politique et démocratie économique pourrait s’imposer comme alternative à la décomposition du système de la Ve République.
Alors que l’exécutif espère faire voter son texte par le Sénat avant la fin de la semaine, la sixième journée de mobilisation contre la réforme des retraites devrait rassembler massivement. Les militants les plus résolus espèrent qu’elle sera le point de départ de grèves reconductibles dans plusieurs secteurs.
Deux articles du projet de réforme des retraites ont été votés dans le courant du week-end au Sénat. Si l’ambiance n’était pas aussi électrique qu’à l’Assemblée, l’opposition de gauche a bataillé à coup d’amendements et de débats à rallonge. La chambre haute a même évoqué son propre régime de retraites.
À l’aube d’une nouvelle semaine de mobilisation, Emmanuel Macron et ses soutiens tergiversent sur la stratégie à adopter. Soucieux de ne pas montrer de signes de faiblesse, l’exécutif est tenté de durcir son discours à l’égard des organisations syndicales, déjà accusées de blocage. Une stratégie périlleuse face à une rue déterminée.
Les dirigeants des huit syndicats de salariés avaient rendez-vous jeudi soir à La Ricamarie, ancien bastion ouvrier de la banlieue de Saint-Étienne. L’occasion d’afficher devant leurs militants une unité toujours aussi forte, et leur détermination à « mettre la France à l’arrêt » mardi.
Le contesté projet de réforme des retraites sera examiné à partir du 2 mars par les sénateurs. L’exécutif en appelle « au bon sens » en prônant de nécessaires économies. Or la première réforme des retraites de 2010 a coûté cher à l’assurance-chômage, du fait de la hausse du nombre de seniors sans emploi à indemniser.
Deux mois après la présentation du projet de réforme des retraites, le ministre du travail a reconnu que pas plus de 20 000 nouveaux retraités bénéficieront chaque année de la revalorisation des petites pensions. Le mythe d’une réforme de « justice sociale » s’effondre, laissant le gouvernement démuni.
Loin d’être réductible à une accumulation de dérapages individuels, l’enlisement des débats sur la réforme des retraites a été guidé par une double volonté de la majorité et de La France insoumise, pour des raisons opposées, de dévoyer l’exercice parlementaire.
Une fédération bretonne de la Capeb, syndicat patronal du bâtiment, ont rompu les rangs et appelé à rejoindre la mobilisation contre la réforme des retraites. Certains de leurs adhérents ont même décidé de payer les jours de grève de leurs salariés.
Face à un pouvoir radicalisé, le mouvement social doit à la fois durcir ses actions et élargir la bataille à d’autres enjeux que la réforme des retraites. La victoire n’est aucunement garantie, mais seule cette voie est constructive, même en cas d’échec.
Alors que les débats doivent prendre fin vendredi à minuit, l’Assemblée nationale ne sait toujours pas si elle aura le temps d’examiner l’article 7, qui porte l’âge de départ à la retraite à 64 ans. Les syndicats et les partis de gauche tentent de convaincre La France insoumise de retirer ses amendements sur les autres articles pour gagner du temps. Jean-Luc Mélenchon a fait savoir, avec fracas, qu’il s’y opposait.
Pour la cinquième journée de mobilisation, les dirigeants des huit syndicats s’étaient donné rendez-vous dans le Tarn. Manière de renouveler le récit médiatique et de contrer une affluence fatalement moins forte. Mais pas d’adoucir le propos face au gouvernement, au milieu d’une foule galvanisée par le défilé.
Le gouvernement échoue à convaincre du bien-fondé de sa réforme. Et pour cause : sur les pensions à 1 200 euros, la situation des femmes ou la démographie, l’argumentaire déroulé de plateau en plateau est truffé de contrevérités.