Longtemps, alors que les universités américaines vantaient leurs programmes de creative writings, ceux qui en France souhaitaient travailler leur écriture devaient se tourner vers des ateliers organisés par des associations, des particuliers… Les choses sont en train de changer. En ces temps de rentrée littéraire autant qu’universitaire, tour d’horizon d’un marché très concurrentiel.
Queens, quartier de New York, Zou Lei, clandestine irréductiblement vivante, Skinner, vétéran démoli de la guerre d’Irak, Jimmy, taulard voué à le redevenir. Un formidable roman, profondément politique, c’est-à-dire qui ne s’affiche pas comme tel. Extrait en fin d’article.
Magyd Cherfi, dans Ma part de Gaulois (Actes Sud), revient sur son enfance de Français d’origine algérienne ne pouvant exister que par effraction. Pour Mediapart, il met les points sur les i.
Andreï Ivanov, russophone, apatride, en un roman picaresque qui n’épargne pas le Danemark, et à travers les aventures de deux olibrius errants et dévastateurs, raconte formidablement le camp humanitaire vu par ceux qui y vivent, dont il a fait partie. Entretien et extrait en fin d’article.
Le projet néoconservateur d’exportation de la démocratie a échoué. Dès lors, comment faire progresser ce système sans faire le jeu d’un pur relativisme en matière de régimes politiques ? Le philosophe Florent Guénard tente de répondre à cette question.
Dans La Pièce obscure, l’écrivain Isaac Rosa décrit une génération de jeunes Espagnols happés par un trou noir, comme une métaphore du marasme ibère. Et il met en scène, dans ce texte sombre et inconfortable, les limites politiques du mouvement « indigné » de 2011.
Premier roman de Jonathan Galassi, à la tête de la mythique maison d’édition new-yorkaise Farrar, Straus and Giroux, Muse est à la fois roman à clé, roman d’apprentissage, histoire d’amours, ode nostalgique, et surtout saga et radiographie cruelle d’un monde littéraire en mutation. Extrait en fin d’article.
Dans « La Succession », Jean-Paul Dubois raconte une évasion et la puissance du fatum suicidaire entre Toulouse et Miami. Alexandre Seurat, dans « L’Administrateur provisoire », roman documentaire, explore la culpabilité, la Collaboration, et ses effets boomerang.
La rentrée littéraire n’est pas seulement une célébration de la littérature française : elle est aussi l’occasion de découvrir quelques trésors venus d’ailleurs, qui nous donnent des nouvelles du monde. Frankenstein à Bagdad, lauréat d’un prix prestigieux du monde arabe, nous fait comprendre la réalité irakienne par les moyens de la fiction la plus débridée.
Retours très particuliers vers les années 1970 et 1980 : éblouissement sous le soleil d’Arles avec Légende, de Sylvain Prudhomme, et premier roman ambitieux de Chloé Thomas, Nos lieux communs, qui interroge les établis d’antan et les incertains d’aujourd’hui. Premier de deux articles autour de ce qui se transmet (ou pas).
Dans son dernier roman, Éric Faye s’intéresse aux kamikakuchi, ces hommes et ces femmes ordinaires « cachés par les dieux », c’est-à-dire enlevés au Japon par le gouvernement nord-coréen à des fins d’espionnage dans les années 1970-1980. Un puzzle choral déclinant les destins d’une demi-douzaine de personnages entre vérité et fiction, pour décrire une réalité qui, loin de se réduire au fait divers, synthétise les complexités géopolitiques d’une partie du globe.
Ce n’est pas un roman qui vient d'obtenir le prix Médicis, mais quel sacré livre ! « Laëtitia », récit subjectif, enquête minutieuse, honnête même dans ses impasses, renoue avec le fait-divers comme « force de frappe cognitive ». Le meurtre de Laëtitia a passionné la France et ridiculisé Sarkozy. La vie reconstituée de Laëtitia la fait exister, et avec elle, le pays silencieux.
Deux récits autour de la Révolution française paraissent simultanément chez le même éditeur : 14 Juillet, d’Éric Vuillard, et Sauve qui peut (la révolution), de Thierry Froger. Radicalement différents, les deux livres se font écho pour cerner la puissance de l'acte révolutionnaire.
C'est un flirt poussé entre actualité et roman : les Shadow Brokers, ce groupe de hackers qui auraient pillé les trésors de la NSA, évoquent furieusement le Sunlight project de Purity, dernier roman de Jonathan Franzen. Lui-même aux prises, cet été, avec une de ces polémiques Internet et Twitter qu’il dénonce.
Comment s’affranchir des phénomènes de domination ? C’est une des questions qui taraudent Didier Eribon, l’auteur de Retour à Reims, et qu’il retravaille dans son dernier ouvrage. Entretien.
Dans un roman hypnotique, Crue (Gallimard), Philippe Forest scrute l'époque, flaire les mutations, devine la catastrophe. À travers un narrateur recru mais aux aguets : « Chacun fait l'épreuve de voir disparaître ce qu'il aime. » Fantastique lecture pour tous…