Entre le 30 juin et le 7 juillet, le « front républicain » s’est reconstitué avec une force étonnante. En cause : un contexte électoral différent de 2022, les ratés de la « machine » lepéniste, et la difficulté structurelle à vendre comme banales des idées qui ne le sont pas.
Un hémicycle non paritaire, peu représentatif de la diversité de la société et en décalage avec la réalité économique et sociale du pays : ces législatives anticipées, organisées en urgence, ont accentué les défauts bien connus de la représentation nationale à la française.
La présidente sortante du groupe écologiste à l’Assemblée nationale, Cyrielle Chatelain, voit dans la « lettre aux Français » d’Emmanuel Macron, qui nie la victoire du Nouveau Front populaire, « une preuve de plus de sa déconnexion ».
Si Marion Maréchal a affirmé qu’elle ne retournerait pas au Rassemblement national après son exclusion de Reconquête, six de ses soutiens ont tout de même été élus députés sous la bannière RN ou RN-LR.
Gouverner sans la gauche, en concrétisant enfin l’alliance entre le camp présidentiel et le parti Les Républicains : c’est l’improbable scénario qui prend de l’épaisseur à droite. Séduit par l’idée, Emmanuel Macron gagne du temps et laisse les deux camps se livrer une bataille des récits.
L’ancien premier ministre a reconnu avoir dîné avec Marine Le Pen, mais ne voit pas le problème. Une énième pierre apportée à l’édifice de dédiabolisation que le Rassemblement national bâtit depuis des années, sur le terreau du confusionnisme et de l’égarement.
Élu député dans la 1ère circonscription du Vaucluse, le militant antifasciste Raphaël Arnault a empêché le RN de faire carton plein dans le département. Parachuté, présenté partout comme « fiché S » – ce qu’il assume – et en concurrence avec un dissident, il s’est imposé en plein Festival d’Avignon. Une victoire qu’il doit un peu au festival et beaucoup aux militant·es.
Arrivé en troisième position aux législatives, le parti d’extrême droite a timidement entamé son « examen de conscience ». S’estimant principalement victimes du front républicain, ses cadres commencent à reconnaître quelques erreurs et dysfonctionnements internes. Mais juste pour la forme.
Face à une situation politique bloquée, une réalité s’impose aux responsables politiques du Nouveau Front populaire : l’heure de la recomposition unitaire a sonné. Il n’est plus temps de tergiverser, mais bien de s’y mettre concrètement.
La députée de Seine-Saint-Denis explique le chemin que le Nouveau Front populaire peut prendre pour gouverner malgré sa majorité relative. Elle acte aussi sa rupture avec La France insoumise et annonce la création d’une nouvelle force politique « au service du rassemblement ».
De 1962 à 2023, soixante ans de choix politiques, de déceptions accumulées et de traumatismes, de la guerre d’Algérie aux retraites, en passant par Maastricht et la laïcité, ont nourri un vote de rupture identitaire, exprimé le 7 juillet à des niveaux record et en toute conscience.
Sans majorité absolue à l’Assemblée nationale, le Nouveau Front populaire est contraint d’imaginer des scénarios pour pouvoir gouverner sans renier son programme, et sans tomber dans l’écueil du passage en force.
Alors que le Rassemblement national l’a emporté dans quatre circonscriptions du nord du département, ses partisans, imprégnés par une « peur de l’étranger » et nostalgiques d’une France passée, vivent avec désarroi les résultats nationaux.
Rarement une dynamique de campagne n’avait autant évolué entre les deux tours d’un scrutin législatif. Quoiqu’en progression nette, l’extrême droite en fait les frais. Arrivé en tête, le pôle de gauche doit composer avec la place centrale conservée par le camp présidentiel. Confirmée, la tripartition de l’électorat fragmente encore davantage l’Assemblée.
Dimanche 7 juillet, 208 femmes ont été élues députées pour 577 sièges. Une proportion loin de l’égalité femmes-hommes et qui recule encore. La faute au sexisme qui perdure, surtout dans les périodes de crise politique.
Détruite par la dissolution de l’Assemblée nationale, devancée par la gauche aux législatives, la minorité présidentielle s’imagine encore avoir la main sur la donne politique. Incapable d’entendre le message des urnes, elle continue de donner des leçons à tout le monde, depuis sa réalité parallèle.