Les Belhoumi incarnent à merveille les familles algériennes venues en France dans les années 1970. Le sociologue Stéphane Beaud a écouté cinq ans durant, entre 2012 et 2017, la fratrie et les parents lui raconter leur vie de ces trente dernières années. Le récit foisonnant et entraînant grave dans la banalité leur destin dans l’histoire française.
Dans son dernier ouvrage, le philosophe Jacques Rancière repose les conditions d’une politique pour le temps présent qui puisse échapper autant à la « gestion experte du présent », à « l’optimisme officiel », au « catastrophisme ambiant » qu’au grand récit de la « nécessité historique ». Entretien.
Si la traduction est un « savoir-faire avec les différences », penser ce que sera la traduction dans un futur proche ou lointain est nécessaire pour imaginer de quoi notre monde sera fait, et pour chercher à « compliquer l’universel » face aux enracinements identitaires comme aux nivellements globalisants.
Pour Emmanuel Todd, l’humanité se trouve face à une mutation anthropologique dont l’ampleur est inaperçue, voire déniée. Les outils de la démographie permettent-ils de prendre la mesure d’un « après-demain » fait de ruptures, de divergences et de fragmentations ? Entretien.
Les poètes syriens ont joué un rôle essentiel dans l’histoire de la modernité de la poésie arabe contemporaine, élaborant des territoires poétiques nouveaux. Ils restent pourtant méconnus. C’est tout l’intérêt de l’anthologie de Saleh Diab, Poésie syrienne contemporaine, de nous les faire découvrir.
Dans La Vie brève de Jan Palach, celui qui écrit n’a pas oublié le 21 août 1968 et l’invasion de la Tchécoslovaquie, ni ce qui a précédé cette date – un printemps –, ni ce qui a suivi jusqu’en 1989 – des silences, des humiliations, la répression. En janvier 1969 a lieu l’immolation par le feu de Jan Palach. Anthony Sitruk, dans un récit-enquête parfois proche du roman, raconte l’histoire de cet homme.
Le président Macron reçu par le pape François. Comme dans Le Rouge et le Noir de Stendhal, un jeune ambitieux n’entend faire qu’une bouchée d’un vieil homme de foi sous couvert de communion. Explication de texte et de gravure.
La bonne idée de cette Pléiade attendue est certainement de l’avoir constituée non en « œuvres complètes » mais en « Mémoires », inscrivant une partie des livres de Simone de Beauvoir dans la grande tradition des mémoires historiques et lui donnant ainsi toute sa place dans l’histoire du XXe siècle. Ce faisant, l’édition invente une œuvre qui n’existait pas en tant que telle.
Le traducteur est un homme de l’ombre : vous voulez savoir à quoi il ressemble ? Lisez Portrait du traducteur en escroc, et vous n’aurez que trop de réponses.
Dans Destination, Franck Magloire dresse le bilan de quatre décennies de désenchantement touchant particulièrement les classes populaires, au cours desquelles l’affirmation de l’économie de marché s’est doublée d’un autre changement radical : celui de l’intime et des mots qui nous pensent.
Quelles relations peuvent exister entre l’amour courtois du Moyen Âge et la loi de 1884 légalisant le divorce ou les débats français autour de l’affaire Weinstein ? Zrinka Stahuljak décrit avec finesse la façon dont l’occultation de l’éros médiéval a structuré la nation française. Entretien.
Peter Singer, philosophe de référence pour tous les défenseurs de la cause animale, retrace les luttes victorieuses de l’activiste américain Henry Spira pour en dégager des « préceptes pour changer le monde ». Entretien à l’occasion de son passage à Paris.
Vous êtes las des commémorations de Mai 68, qui veulent couler un printemps dans un massif monument national ? Lisez un roman japonais de 1966 : vous sentirez siffler la brise de la révolte. Devant mes yeux, le désert, de Shuji Terayama, est réédité chez Inculte, tandis que le festival Côté Court consacre une rétrospective à cet écrivain, qui est aussi un homme de théâtre et de cinéma.
Récit graphique signé par le romancier Camille de Toledo et l’illustrateur Alexander Pavlenko, Herzl, une histoire européenne, est une déambulation inspirée, qui prend parfois la forme d’une enquête, sur les traces de Theodor Herzl, fondateur du mouvement sioniste.
À première vue, les deux romans venus du Liban et qui viennent d’être publiés chez Actes Sud sont très dissemblables. Cependant l’un et l’autre posent la question du silence. Question majeure dans un pays où l’on parle beaucoup, mais où il y a tant de choses qui ne se disent pas, depuis les relations intimes jusqu’aux désastres des guerres.
Tous les chats sautent à leur façon est un livre d’entretien avec la romancière allemande d’origine roumaine Herta Müller, dans lequel cette auteure, qui reçut le prix Nobel de littérature, relate, avec tranquillité mais fermeté, son histoire et notamment ses années vécues dans un village coupé du monde pendant la dictature des Ceausescu.